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Transition : l’euphorie du peuple a-t-il  brouillé le message du CTRI?

Les militaires, hommes forts actuels du Gabon aujourd’hui, semblent dérouler avec une certaine aisance ce qu’ils ont préconisé pour leur transition: parlement de la transition nommé, institutions de la transition mises en place, gouvernement panégyrique composé, le dialogue national inclusif organisé, la constituante désignée, la nouvelle constitution écrite et maintenant cap vers le fameux référendum. Les Hommes en treillis seraient-ils des Orfèvres de grandes précisions ?

Par Jean Hilaire Biteghe

Beaucoup de gabonais et autres observateurs de la situation politique du Gabon se disent surpris de la sérénité avec laquelle les militaires mènent leur barque malgré certaines incompréhensions et interprétations qu’ils ont de certaines actions des militaires du 30 août 2023. En effet, certains gabonais disent que les militaires n’ont pas changé grand-chose et que jusqu’à présent, l’essentiel n’a pas bougé.  Pour ces plaintifs sûrement obnubilés par l’idée du changement, la chute du précédent pouvoir n’a pas amené le changement qu’ils espéraient. Changement, disent-ils ?

Jean Hilaires Biteghe Obame , journaliste d’investigations, ©D.R

Les militaires du CTRI à leur arrivée, n’ont jamais parlé de changement mais plutôt d’alternance comme d’ailleurs plusieurs partis et Hommes politiques du Gabon. Alors que signifie changement dans l’entendement collectif quand on sait qu’il engagé une modification plus ou moins profonde d’une situation, le CTRI savait qu’il fallait prendre garde que ce soit le désir éclairé de réformer qui attire le changement, et non le désir frivole du changement qui attire la réforme. Le changement pour un Etat n’est pas ce qui trotte dans les têtes de la plupart, cela implique le changement de vie, de conduite, de système, de conditions. Le CTRI, dans toute sa prudence, enfin je crois, a compris qu’il est bon de ne pas faire des nouvelles expériences pour raccommoder un État, sans une extrême nécessité et un avantage visible.

Les membres du CTRI acteurs, à l’intérieur de cette organisation, ne devront jamais être passifs car, ils ne sont pas seulement des instruments de la domination ; parce que sans leur implication et s’ils ne s’approprient pas la philosophie proposée, le changement ne peut tout simplement pas avoir lieu.

  Le CTRI regarde autour de lui, dans les pays qui ont opté pour le changement tout de GO et a constaté que, celui qui gagne au changement remercie la fortune et le temps mais celui qui perd, s’en prend à l’auteur de la nouveauté d’où le cycle d’instabilité que l’on ne vit pas très loin de notre pays. Aimer le changement pour le changement,  c’est pour faire diversion.

Le CTRI et le dialogue national inclusif n’ont jamais dissous le parti démocratique gabonais (PDG), ce parti politique a été suspendu de toutes compétitions politiques pendant 3 ans et encore que, ce n’était qu’une recommandation.  Cette proposition avec ces termes-là, a été, à son annonce, nourri par une très grande ovation à faire sauter l’applaudimètre par ce même peuple présent en ces lieux, durée de trois (3) ans qui correspond à la fin de la transition et des futures élections surtout la présidentielle. Et s’il faut s’en tenir à cela, le PDG n’a enfreint aucune décision ou résolution du CTRI ni dialogue national inclusif. La rentrée politique d’un parti politique non dissout, quoi de plus logique pour ne pas dire normal. Ce qui par contre ne le serait pas, c’est une candidature à une élection avant l’épuisement des trois (3) années de suspension. Mais sans oublier que personne n’a dit au peuple que la proposition de suspension du PDG au DNI a été retenue.

Brice Clotaire Oligui Nguema et le CTRI n’ont jamais menti au peuple gabonais sur le sort du parti démocratique gabonais, le PDG n’est pas suspendu, Oligui Nguema a simplement redéfini les statuts des formations politiques en déclarant haut et fort qu’il n’y avait plus de majorité ni d’opposition pour la simple logique que ce sont les militaires qui sont au pouvoir et les militaires et le CTRI ce n’est pas un parti politique. C’est aussi pourquoi l’on constate la trop forte implication des membres des partis politiques et de la société civile dans la nomenclature de gestion du pouvoir militaire issue de l’opération du 30 août 2023, de façon inclusive ( la suite arrive)

Avec cette idée de les dépouiller de leurs agendas politiques cachés et de l’idée d’une révolte si ce n’est d’une révolution car des membres des associations politiques, laissés en l’état pouvaient toujours nourrir cette propension de contester les décisions des nouveaux chefs et brandir la menace des soulèvements surtout pour la société civile. Le regard est plus éclairci avec cette clause sur la non-participation des coptés à la gestion de la transition à la toute prochaine élection présidentielle. Il ne faudrait pas oublier que dans l’armée, l’ordre venant de la hiérarchie s’exécute d’abord et sans rechigner, les explications pourront arriver après si cela était nécessaire. Accepter de faire partie du fonctionnement des militaires c’est respecter à la lettre les ordres de ces derniers et vouloir faire  » genre après », c’est s’exposer aux affres de la discipline militaire surtout, quand personne n’a été contraint de pactiser avec le CTRI.

 Oligui Nguema n’a jamais floué ou menti à qui que ce soit, c’est simplement que l’euphorie qui couvrait les moments sensibles de la transition dans ses premières heures qui furent aussi les instants des grandes décisions, ont complètement anesthesiés la vigilance et l’intelligence des gabonais non-initiés à la science de la captation de l’indocilité.

Dans tous les cas, l’impression qui se dégage maintenant de la philosophie du pouvoir du CTRI, c’est celle d’effacer toutes les traces du passé des corps habillés, quand ce n’était pas encore CTRI, effacement qui entraînerait l’absolution totale des errements de ces derniers quand il fallait mater les indociles au pouvoir du régime déçu. Le CTRI, en arrivant à la tête du pays, a donc décidé de faire table rase de ce passé pas vraiment propre voire même inconvenant pour les forces de sécurité et de défense, d’où la fermeture en douceur de cette porte qui donnait encore accès à une vue cauchemardesque sur ce passé lointain et proche. Tout ceci, en vérité, n’a rien d’étonnant et n’a pas étonné le peuple parce que, savamment présenté au peuple comme une amnistie proclamée à l’endroit des auteurs du 30 août 2023. La pilule est passée sans trop de difficulté car le reflet du monde en mode justice sociale de cet instant, mettait d’autres souvenirs, hors contexte. Il faut l’avouer, c’était du très grand jeu et du beau jeu, un tour de magie qui ne sortait pas le lapin du chapeau mais qui faisait disparaître le lapin dans le béret, du grand art.

Ainsi, l’image d’un peuple tolérant, résilient et démocrate était préservée. Approche renforcée lorsque Brice Clotaire Oligui Nguema, parlant du projet de la nouvelle constitution, demanda à ses scribes subitement révélés, de ne rien tailler à sa mesure en rappelant à ces manitous de la transition que seul le peuple et le Gabon étaient le sujet de toutes les convoitises et en même temps, de la toute grande attention et protection. Cette sortie du Général Président exprimait ainsi son désir de promouvoir la démocratie et la justice en les gravant profondément dans la mère des lois en gestation. La démocratie qui ne s’accommode pas, en principe, avec les coups de force des militaires, que ces opérations soient considérées comme coup de libération, pour la liberté ou de coup d’État des justes et même de révolution de palais, une seule vérité reste intangible, c’est que les Hommes d’armes sont sortis des casernes pour s’imposer dans les palais.

   Mais Avéa, Kinguélé, Venez-voir, les Pk et leurs cousins disent que seul le peuple a le pouvoir d’accepter et de proclamer une amnistie à l’endroit des auteurs des coups de force comme ce fut le cas le 23 août 2023, jamais une loi, une ordonnance, un décret. Et d’ailleurs, frappé de ce sceau, les coups d’État à venir sont légitimés voire encouragés. C’est dire de facto à tous ceux qui lorgnent le pouvoir que, les coups d’État sont légaux, encouragés et les bienvenus. Voilà un risque à ne pas courir et un dispositif à finement encadré. Pendant ce temps, le choix entre le OUI et le OUI nous attend.

                 Journaliste d’investigations, lauréats international, dunkerque, bull international URTI

Contact: 066 12 14 02

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