Il y a au Gabon une vérité que tout entrepreneur connaît, mais que peu osent dire : la réussite ne dépend pas uniquement du talent ou de la rigueur, mais de la main qui vous tire. Le pays regorge d’idées, de projets et de compétences, pourtant les résultats économiques restent faméliques. Pourquoi ? Parce que dans notre environnement d’affaires, la recommandation vaut plus qu’un diplôme, et la proximité plus qu’un plan d’affaires.
Louis- Paul MODOSS…

Depuis des décennies, les gouvernements, les institutions et les acteurs privés parlent de réformes, de diversification, d’innovation. Mais sur le terrain, la réalité est moins rationnelle que relationnelle. Ici, pour pénétrer un cercle d’influence, il faut être introduit, validé, reconnu. Sans cela, même la meilleure idée reste dans les tiroirs.
Cette culture du réseau n’est pas qu’une anecdote : elle structure l’économie. Selon plusieurs entrepreneurs interrogés, près de 70 % des opportunités d’affaires passent par la recommandation, et non par la compétence ou la transparence des appels d’offres. Résultat : les mêmes cercles se reproduisent, les mêmes visages se partagent les marchés, pendant que les jeunes créateurs tournent en rond avec leurs « 1000 stratégies, zéro résultat ».
Le pire, c’est que cette logique entretient une forme de méfiance institutionnelle. On ne croit plus aux règles, mais aux relations. On ne cherche plus la performance, mais la protection. Et c’est tout le dynamisme du pays qui s’enlise dans une économie de connivence.
Il ne s’agit pas de diaboliser le réseau — il existe partout. Mais dans un pays où la croissance reste fragile et où 60 % des jeunes peinent à trouver leur place, il est urgent de réhabiliter la compétence comme véritable passeport social. Le Gabon n’a pas besoin de plus de stratégies, il a besoin d’un environnement où le mérite parle plus fort que la recommandation.
… Chroniqueur économique