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Commerce de proximité : les Gabonais à l’assaut d’un marché longtemps confisqué

Les autorités gabonaises ont décidé de formaliser le commerce de proximité, une mesure visant à favoriser l’essor des entrepreneurs locaux et à stimuler la consommation des produits et services estampillés « Made in Gabon ». L’initiative s’inscrit dans une logique de souveraineté économique et de réduction de la dépendance vis-à-vis des opérateurs étrangers qui dominent ce secteur depuis plusieurs décennies.

 

Louis-Paul MODOSS; Chroniqueur économique

Un secteur historiquement occupé par des étrangers

Le commerce de proximité au Gabon repose depuis longtemps sur l’initiative de ressortissants étrangers, principalement venus d’Afrique de l’Ouest. Chaque communauté a su imposer son savoir-faire et sa compétitivité dans un domaine spécifique :

  • Ghanéens : cordonnerie
  • Béninois : vulcanisation
  • Nigérians : coiffure masculine, pièces détachées
  • Guinéens : cafétérias “dos tournés”
  • Camerounais : taxis urbains
  • Sénégalais : restauration
  • Nigériens : grillades et viandes braisées
  • Maliens : épiceries de quartier
  • Libanais : alimentation générale

Cette structuration a permis à ces opérateurs étrangers de développer de véritables réseaux organisés et solidement ancrés, avec des prix compétitifs et une clientèle fidèle.

L’émergence d’une initiative nationale

Depuis une dizaine d’années, une nouvelle génération de Gabonais a commencé à investir le secteur, notamment dans :

  • la restauration,
  • les produits agroalimentaires,
  • les commerces de proximité modernes.

Cependant, ces initiatives restent freinées par deux obstacles majeurs :

  1. Des coûts plus élevés que ceux pratiqués par les opérateurs étrangers.
  2. Une qualité inégale des produits et services proposés.

Ces faiblesses expliquent en grande partie pourquoi les consommateurs, sensibles avant tout au rapport qualité-prix, continuent à privilégier les commerces étrangers.

Le défi du « Made in Gabon »

La formalisation décidée par les autorités vise à corriger ces déséquilibres en offrant un cadre réglementaire et des incitations pour les commerçants gabonais. L’objectif est double :

  • Créer des emplois locaux dans un secteur à forte intensité de main-d’œuvre.
  • Encourager la consommation patriotique, en orientant la demande vers les produits offerts par les nationaux.

Mais les experts préviennent : le succès du « Made in Gabon » dépendra de la capacité des opérateurs locaux à aligner leurs prix et à garantir la qualité de leurs offres.

Le consommateur, arbitre du marché

Dans un contexte marqué par une inflation régionale et un pouvoir d’achat limité, le consommateur gabonais reste pragmatique. Comme le rappelle un économiste local, « le client n’achète pas pour plaire à celui qui vend, mais pour combler un besoin et être satisfait ».

La compétitivité des commerces nationaux repose donc sur une proposition de valeur claire, associant :

  • prix accessibles,
  • qualité constante,
  • services innovants,
  • proximité renforcée.

Une opportunité à saisir

Si les défis sont nombreux, cette réforme pourrait marquer un tournant économique et social pour le Gabon. Le développement d’un véritable tissu de commerces locaux contribuerait à :

  • retenir la valeur ajoutée sur le territoire,
  • créer des emplois directs et indirects,
  • valoriser le savoir-faire gabonais.

En somme, la formalisation du commerce de proximité représente une chance historique pour le « Made in Gabon », à condition que les opérateurs locaux réussissent à transformer l’initiative politique en réalité économique durable.

 

 

 

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