PAR : Jean-Christian KOMBILA
DANS son Discours à la nation, le samedi 16 Août 2025, à l’occasion de la commémoration du 65 ème anniversaire de l’accession du Gabon à la souveraineté internationale, le Chef de l’Etat, Brice Clotaire Oligui Nguéma a mis en exergue le « fil rouge » fondateur de la gouvernance politique sous la V è République naissant. Celui-ci pointe opportunément » La Géopolitique » locale au rabais !
Du moins, en tant que modalité et principe de gouvernance politique a priori consensuel, en vogue pendant le long magistère (1967-2009) à la tête de l’État, du président Albert Bernard Bongo, devenu Omar Bongo à la suite de sa conversion à l’Islam puis El Hadj Omar Bongo Ondimba après son pèlerinage à la Mecque, sans jamais se départir de son authenticité captivante et unique.
Le ton solennel et au fond grave, l’Homme du 30 Août 2023 a tenu à inscrire son adresse au peuple dans la même perspective du « Coup de Libération ».
L’impulsion présidentielle est en soi un engagement officiel devant la nation à ne jamais céder aux tentations de repli identitaire. Conscient que le régionalisme, pour parler cru, le reflexe ethnique est un mal profond qui ronge dangereusement de nombreux pays d’Afrique, voire au-delà.
« L’ Homme-Nation » qu’il est aux yeux du peuple souverain envoie un message fort à son cabinet avant tout, lequel est invité implicitement à ne point cultiver les séparatismes sectoriels et la « balkanisation » des uns ou des autres. Les ministres et leurs cabinets respectifs, la haute administration et les services déconcentrés doivent se réinventer en se démarquant des relents claniques et tribalistes encore dominants.
En outre, les Institutions constitutionnelles de la Transition gagneraient à s’approprier ce Discours de rupture en prélude à leur renouvellement .
Saisissant ce moment historique, Brice Clotaire Oligui sonne au demeurant l’hallali contre cette conception de la Gestion de l’Etat fondamentalement articulée autour du partage géo ethnique du pouvoir.
Cette séquence inédite du Discours présidentiel est, naturellement, digne d’intérêt médiatique.
Elle l’est d’autant plus que, mise en cohérence avec le contexte politico-social post-présidentielle du 12 Avril 2025 et pré-Législatives et Locales à venir, les électeurs ont là une opportunité extraordinaire spectaculaire de s’arrimer à la volonté politique assumée de hâter la recomposition en profondeur du paysage politique national. Sachant, comme le disait l’ancien président du PGP, Me Pierre Louis Agondjo Okawé, que » tous les partis politiques gabonais recrutent sur des bases tribales ».
Évidemment, la critique de « La Géopolitique » locale au rabais est fondamentale.
Pour sa part, le président Oligui Nguéma tient son pari et montre le chemin. A savoir, éliminer la distance physique et psychologique qui existe entre les gens, du fait des clivages entretenus à des fins pouvoiristes. Lui, considère chaque gabonais comme un membre de sa famille.
Ce positionnent est salué par une grande majorité des élites et de concitoyens.
En l’occurence, des purs produits de l’École de la République, identifiables par leurs cursus académiques aboutis et un savoir-faire doublé d’expertise inexploités se positionnent moralement en première ligne, tel un peloton d’élite de la « Garde présidentielle » en vue de défendre et promouvoir cette vision fédératrice des énergies, autant que le rassemblement de la nation.
Néanmoins, on convient objectivement qu’au détour de son fonctionnement observé quotidiennement à travers la valorisation des éléments aussi divers que l’Ethnicité ambiante et rétrograde, le Népotisme et les solidarités infra-étatiques suspectes, l’État post-colonial n’est guère parvenu à donner naissance à l’État Impartial que projette ce Discours présidentiel.
Certes, traditionnellement, l’enjeu « Géopolitique » local qui peut fonder son mérite partiel maintient la participation relativement équitable des ethnies à l’exercice du pouvoir comme unité de mesure du succès managerial en l’espèce.
Qu’à cela ne tienne, on s’impatiente à vivre la Refondation de la nomenclature de l’élite politico-administrative indispensable au maintien des équilibres régionaux et national. Qui plus est dans le nouveau contexte politique de la V è République, où la Ligne Maginot entre la Majorité et l’Opposition n’est plus tout à fait visible. Certes aussi, que la question de la représentativité des communautés et des territoires est une équation politique dont le Gabon et l’Afrique ne revendiquent guère le monopole.
Mais autant qu’on se souvienne, il n’y a pas eu procès plus édifiant contre « La Géopolitique » que le Testament politique du président Omar Bongo lui-même :
« Le Gabon est aujourd’hui affaibli par l’ethnisme, le clientélisme, l’affairisme, la corruption, la politisation outrancière qui ont gangrené les pouvoirs publics » avait-il affirmé le 2 décembre 2007 à l’occasion du 40 è anniversaire de son arrivée au pouvoir.
Ce pathétique et cruel panorama n’est-il pas au fond toujours de saison ?
En principe, le « Coup de Libération » à été porté par un élan profondément patriotique du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) de tourner la page sombre de quatorze années de perpétuation d’un présidentialisme ayant miné l’Unité nationale et dévoyé la Démocratie, tout en renvoyant le développement économique et social durable aux calendes grecques.
En revanche, la V è République dessine une ère nouvelle de transformation économico-industrielle et systémique donnant la priorité à la « Souveraineté économique » en vue de garantir le progrès social et concrétiser l’indépendance nationale véritable.
Oui « dorénavant, nous devons transformer notre bois en meubles, notre pétrole en carburant raffiné, nos minerais en matériaux et alliages précieux, notre or en bijoux finis, notre cacao en chocolat gabonais, notre marbre en carreaux et notre potasse en engrais ».
Le cap de l’avenir est bien fixé par Brice Clotaire Oligui Nguéma, soucieux de féconder la préférence nationale, mobiliser les forces vives de la nation, libérer tous les circuits économiques et commerciaux autrefois verrouillés.
Objectif : promouvoir l’entrepreneuriat propice au plein-emploi.
L’ultime Défi de l’Exécutif, nécessaire à la consolidation du nouveau Pacte républicain repose sur le renforcement de l’Etat de droit, la construction méthodique d’une Conscience démocratique partagée par toutes les forces politiques et les maillons du processus électoral, voire la quête permanente des performances dans la conduite des politiques.
Par dessus tout, il est question de sauver le citoyen Gabonais. Étant donné que Restaurer les Institutions, c’est avant tout refonder les pratiques contre – productives qui ont prévalu depuis lors en matière de recrutement des élites politiques et administratives à l’échelle nationale.
Le Défi de la Transformation globale requiert une aptitude d’humilité à se remettre en cause. Car trop de politiciens véreux, et reconnus comme tels par les pairs excellent sans vergogne dans l’art de la délation pour freiner des quatre fers le renouvellement des élites.
Enfin, dans cette conjoncture incontestablement critique, le volontarisme politique affiché entend rendre ici l’impossible à portée de mains. Entendu, en effet, qu’ « il n’ y a de richesse que d’hommes » !
Et que, mieux, la seule querelle qui vaille est, assurément, celle de l’Homme. Bien sûr, c’est l’Homme qu’il s’agit de sauver, de faire vivre, de développer » au-delà de « La Géopolitique » locale. Dont l’écho assourdissant du concept de l’Ethnicité en question, interroge finalement la pertinence et le rôle déterminant d’autres liens sociaux multifonctions, nécessairement mobilisables par les impétrants candidats aux responsabilités dans l’appareil d’État.
Au final, « la Géopolitique » comme diffusion géo ethnique du pouvoir n’est pas tant le Drame Gabonais. En tout cas, le Tournant stratégique amorcé par l’Exécutif ouvre plus ou moins une voie fécondante à l’avènement de la géocompétence.