Les conditions de l’unité nationale sont encore loin d’être réunies au Gabon, petit pays pétrolier d’Afrique centrale, où l’ethnie, la tribu, le clan (…), constituent toujours les identifiants et les référentiels de base, pour la grande majorité de sa population de quelque 1,5 million d’habitants.
Par Jean Christophe Obiang Okana
Le commun des Gabonais n’a pas encore vraiment conscience de son appartenance à un groupe uni dans une même communauté de destin où le vivre ensemble et le sentiment national sont des valeurs cardinales constitutives de la nation.
Exclusion sournoise
Sous Omar Bongo Ondimba, le sentiment national a été galvaudé à un tel point, au cours de son magistère de plus de 42 ans à la tête du Gabon, qu’il reste encore un vœu pieux, une vue de l’esprit.
L’exclusion systématique mais sournoise, d’une catégorie de citoyens par le fondateur du Parti démocratique gabonais (PDG) a relégué sine die la concrétisation de l’idée de nation et du concept de l’unité nationale.
Sans exagération aucune, au Gabon, l’unité nationale est encore une unité de façade, un abus de langage, un simple slogan, scandé, de manière générique, au gré des discours politiques officiels, sans réelle maitrise de son sens profond,
Omar Bongo Ondimba n’appréciait pas particulièrement les Fangs. il n’est pas possible à un leader, qui doit être au-dessus de la mêlée, de gouverner en toute impartialité et d’œuvrer en toute sérénité pour l’unité nationale, s’il voue une haine viscérale à une partie de son peuple. Par son comportement atypique envers les Fangs, Omar Bongo Ondimba a été, lui-même, le premier fossoyeur de l’unité nationale au Gabon.
Il a tout fait pour éteindre les Fangs, du moins, sur le plan politique. N’eût été leur résilience, leur dynamisme, leur nombre (ils sont plus de 35% de la population), leur énergie débordante et leur influence intellectuelle, les Fangs auraient été réduits à leur plus simple expression.
Sous Omar Bongo Ondimba, tout se passait comme si les Fangs n’étaient pas des Gabonais à part entière mais des citoyens de seconde zone, un statut aux antipodes de l’Etat de droit, qui prône un traitement équitable et sans discrimination de tous les citoyens..
Omar Bongo Ondimba redoutait et se méfiait tellement des Fangs, qu’il les a écartés des postes sensibles et stratégiques, des métiers d’argent et des armes. Ils pouvaient, certes, les intégrer, maïs sans toutefois qu’ils soient responsabilisés à un très haut niveau. Aucun Fang n’a jamais occupé les fonctions de directeur de cabinet du chef de l’Etat ou de secrétaire général à la présidence de la République, il y a eu, certes, l’intermède du défunt François Engoang Owono, mais c’était sous Ali Bongo Ondimba, et son expérience (en tant que secrétaire général) a d’ailleurs tourné court.
Sous Omar Bongo Ondimba, aucun Fang ne pouvait non plus prétendre à de hautes fonctions au sein des régies financières (trésor, douane, impôts et domaines) et dans certains corps des forces de défense et de sécurité (garde républicaine; gendarmerie nationale, forces armées..).
En réalité, Omar Bongo Ondimba n’aimait pas les Fangs et il aurait bien voulu les tenir à l’écart de tout. Mais ces derniers se sont révélés incontournables, à un tel point qu’il lui était difficile de se passer de leur expertise. Il a donc dû faire contre mauvaise fortune, bon cœur, en choisissant d’exploiter, au profit de son régime, leurs compétences dans tous les domaines (politiques, intellectuels, universitaires, scientifiques, techniques et technologiques).
Neutraliser les Fangs
Les relations compliquées entre Omar Bongo Ondimba et les Fangs viennent de ce que ces derniers étaient très nombreux et virulents à contester sa gouvernance du pays. Alors, pour conserver son pouvoir, Il a cru bon devoir les neutraliser et les isoler, en montant contre eux toutes les autres ethnies. Il voulait absolument éviter que ces dernières n’adhèrent à leurs idées sur sa gouvernance chaotique, nébuleuse, patrimoniale et népotique.
Dans cette optique, Omar Bongo Ondimba a d’abord présenté les Fangs tels de grands méchants ogres, qui vont tout accaparer, sans rien laisser aux autres ethnies, si jamais ils s’emparaient de son pouvoir.
De manière subtile, il a ensuite fait passer le message selon lequel les Fangs contestent son régime, juste parce qu’il n’est pas un des leurs. L’argumentaire léger et le message mensonger d’Omar Bongo ondimba ont été reçus comme parole d’Evangile. C’est ainsi qu’il a réussi à fédérer autour de lui les non-fangs (les Bilops) et à les convertir à sa haine du Fang. Au lieu d’être le chantre de l’unité nationale qu’il aurait dû être, Omar Bongo ondimba a plutôt allumé la flamme de la division, qui continue de se consumer jusqu’à présent.
Tribalisme
Aujourd’hui, le tribalisme anti-fang est la chose la mieux partagée au Gabon. Mais il ne fait pas bon l’exprimer avec ostentation, Omar Bongo le voulait discret et sournois. Tout le monde n’a cependant pas pu se contenir. A la tribune du Conseil national de la démocratie (CND), le 28 octobre 2021, un certain Max Anicet Koumba a fustigé « l’imposture » des Pahouins (entendez les Fangs) qu’il a accusés de « bloquer le pays » A quel niveau?.
Alors que le PDG cherchait un successeur à Omar Bongo Ondimba, qui venait de décéder, le 09 juin 2009 à Barcelone (nord de l’Espagne), une consigne a été donnée: Tout sauf les Fangs (TSF). Guy Nzouba Ndama, alors président de l’Assemblée nationale, est soupçonné d’avoir lancé le mot d’ordre. Il s’en défend aujourd’hui.
Omar Bongo Ondimba lui-même n’a pu s’empêcher d’exprimer son ras-le-bol. Sous le sceau de la confidence, il a eu à dire un jour qu’il avait plus confiance à un Bûcheron (opposant radical) du Haut-Ogoué (sa province natale) qu’à un Pédégiste du Woleu-Ntem.
Ce jour-là, il avait tombé le masque et donné le ton de sa relation, d’une part, avec le « Grand Nord » et, d’autre part, avec ses habitants: les Fangs. A l’opposé des huit autres provinces du pays, la région septentrionale du Gabon se distingue par son homogénéité linguistique et culturelle, C’est, par excellence, le pays fang.
En dehors du Woleu-Ntem, les Fangs se retrouvent aussi dans quatre autres provinces du Gabon: Estuaire (Ouest), Moyen-Ogooué (Centre), Ogooué-Maritime (Centre-Ouest) et1 Ogooué-Ivindo (Nord-Est). En s’exprimant1 comme il l’a fait, ce jour-là, Omar Bongo Ondimba visait tous les Fangs et non ceux du Woleu Ntem. en particulier. Lui-même savait que c’est ainsi que ses propos seraient analysés et compris par les Fangs qui, du reste, sont presque tous parents et, par conséquent, entretiennent des liens très forts de solidarité, d’hospitalité et d’entraide.
D’ailleurs, Paul Mba Abessole, le leader retraité de la politique du Rassemblement national des bûcherons (RNB), aujourd’hui Rassemblement pour le Gabon (RPG), qui a fait vaciller son pouvoir en 1990, n’est pas originaire du Woleu-Ntem. C’est un authentique fang de l’Estuaire, né à Ayeme Awoula, dans les environs de Kango.
La division
Omar Bongo Ondimba a compris qu’il ne devait pas se limiter seulement à monter les autres ethnies contre les Fangs, il lui fallait aussi les diviser, semer la zizanie à l’intérieur même du groupe. Pour venir à bout d’une communauté aussi soudée, unie par l’histoire, la culture et la langue, il a dû faire preuve d’ingéniosité. Omar Bongo Ondimba a d’abord ciblé les plus modérés d’entre eux, une minorité, sur laquelle il s’est appuyé. Pour obtenir son soutien, il l’a gâtée et choyée, avec argent, honneurs, privilèges et postes de responsabilités à l’appui.
En revanche, il a affamé les plus radicaux et hostiles envers son régime, les plus nombreux. Il les a affaiblis en les privant de tout. Certains ont même, parfois été limogés de leurs fonctions, sans autre forme de procès. D’autres sont rentrés dans les rangs, vaincus par l’argent et les honneurs.
Faux démocrate
Pour se donner des allures de démocrate et de bon samaritain, Omar Bongo.Ondimba faisait mine de partager le pouvoir avec les Fangs, une illusion puisque tout le monde le savait jaloux de ses prérogatives.
Il a fait de la fonction de Premier ministre, chef du gouvernement, une exclusivité des Fangs de l’Estuaire, juste pour les faire apparaitre, auprès des autres ethnies et même de leurs « frères » des autres provinces, tels des privilégiés du système Bongo-PDG, ce qui était loin d’être le cas.
Aucun Fang, aussi fortuné soit-il, n’arrive à la cheville d’un membre du clan Bongo, avec voitures de luxe, splendides villas en Europe et aux États-Unis, comptes en banque garnis dans les paradis fiscaux, etc. En tout cas, s’il en existe, leur nombre est insignifiant par rapport à la longue liste des milliardaires en dollars du clan Bongo, qui compte parents proches et éloignés, membres de l’ethnie et alliés, amis, membres des réseaux de la Françafrique, hommes d’affaires, etc.
Les Fangs n’étaient que les boucs émissaires d’un régime Bongo-PDG qui les rejetaient et dont ils ne pouvaient attendre rien de bon, sinon porter le chapeau de ses malheurs, ses dysfonctionnements.
Pomme de discorde
Avec la primature, Omar Bongo Ondimba disposait d’une pomme de discorde, qu’il pouvait actionner à tout moment pour, soit semer la division et la mésentente chez les fangs de l’Estuaire, du moins leurs leaders politiques, soit les jeter en pâtures aux autres ethnies. D’ailleurs, en maintenant la primature dans l’Estuaire, chez les Fangs, durant son long magistère, il n’était pas sans ignorer qu’il allait lasser et exaspérer les autres groupes ethniques.
Egalement intéressés, ces derniers n’appréciaient pas du tout qu’ils ne soient pas éligibles à cette fonction républicaine. Alors, plutôt que de s’en prendre directement à Omar Bongo Ondimba, lui-même, ils s’acharnaient sur les Fangs, les accusant de s’accrocher au poste, alors qu’il n’en était absolument rien. Les Fangs eux-mêmes étaient les premiers surpris par tant de sollicitude et d’égards de la part d’un pouvoir hypocrite et hostile envers eux. Auraient-t-ils, eux-mêmes, négocié et supplié Omar Bongo de leur confier la primature, qu’il leur aurait réservé une fin de non-recevoir. Son objectif n’était pas de faire plaisir aux Fangs. Loin de là! Il était juste à la recherche de la petite bête qui pouvait fâcher toutes les autres ethnies avec eux.
Seul maitre du jeu
Personne n’a vraiment pu résister à Omar Bongo Ondimba. Seul maitre du jeu, il soufflait le chaud et le froid. Son habilité de prestidigitateur, mais surtout avec l’argent du pétrole, qui coulait à flots et qu’il captait par le biais de sa nébuleuse Delta Synergie, il a réussi à renverser bien des situations, même les plus compromises, et à mettre à ses pieds pratiquement tout le monde: les Politiciens de tous bords, les hommes d’affaires, les Médias, les élites, les intellectuels (…). Au niveau national comme international.
Certains de ses opposants politiques que l’on croyait irréductibles sont devenus inoffensifs, doux comme des agneaux. “Tout homme a un prix », disait-il.
Brouiller les Fangs entre eux, les opposer à tous les autres, c’était l’objectif recherché par le fondateur du PDG. Il a réussi, au-delà même de ses espérances.
Seize ans après son décès, sa politique continue de détruire le tissu social et mettre en péril le vivre ensemble.
Agression de ACBBN à Mitzic
Alain Claude Bilie By Nzé (ACBBN), le dernier Premier ministre du président déchu Ali Bongo Ondimba, en a fait l’amère expérience, jeudi 13 février 2025, à Mitzic. Un groupe d’individus s’est farouchement opposé à ce qu’il puisse tenir un meeting politique dans le chef-lieu du département de l’Okano, dans la province du Woleu Ntem. Le fait n’est pas inédit. De nombreux acteurs politiques ont souvent été confrontés à pareille mésaventure mais dans le Haut-Ogooué (sud-est), par excellence, la province présidentielle.
Que l’agression contre ACBBN ait eu lieu dans le Woleu-Ntem, en pays fang, est tout simplement triste et décevant, Omar Bongo Ondimba a eu raison de la solidarité et de l’hospitalité, valeurs cardinales de la société fang. Même si c’était pour lui faire payer ses abus lorsqu’il était avec le pouvoir Bilie By Nzé ne méritait pas l’accueil chahuté qu’il a reçu à Mitzic. D’abord, en tant que citoyen d’un État de droit. Ensuite, en tant que Fang dans une province qu’il peut également considérer comme sienne.
Le repli identitaire
Les ethnies du Gabon, toutes sans exception, sont allergiques aux Fangs. Le Gabon n’ayant jamais connu dans son histoire les atrocités d’une guerre civile inter-ethnique, les causes profondes d’une telle rancœur sont donc à rechercher ailleurs que dans l’histoire des relations entre les peuples du Gabon.
En tout cas, la question mérite un débat public, pour prévenir tout dérapage. Un problème bien posé est déjà à moitié résolu, dit-on. Mais à y regarder de très près, la politique d’ostracisation des Fangs, pratiquée depuis plus d’un demi-siècle par le régime Bongo-PDG, n’est pas étrangère au sentiment anti-fang qui s’est propagé comme une trainée de poudre.
Même les hôtes étrangers, qui vivent au Gabon, savent que les Gabonais se détestent entre eux et ils en profitent pour piller allègrement le pays avec la complicité des nationaux qui les préfèrent d’ailleurs à leurs propres compatriotes. C’est ainsi que sortie de nulle part, une légion étrangère a même pris ses quartiers au palais du bord de mer, siège de la présidence de la République, et mis le pays en coupes réglées. Elle existait déjà sous Omar Bongo Ondimba mais elle était très discrète, à l’époque.
Elle a sorti ses griffes lorsque le bateau Gabon est devenu ivre parce qu’il n’avait plus de timonier à son bord, sous le président déchu, Ali Bongo Ondimba. Même au plus fort de la domination de la légion étrangère, les Fangs étaient toujours le souci et la préoccupation majeure.
Leurs faits et gestes étaient suivis, scrutés et analysés, parce que considérés comme un repli identitaire potentiellement dangereux.
L’association Ossimane, qui vient juste d’être portée sur les fonts baptismaux, pour accompagner le président de la transition, le général de Brigade, Brice Clotaire Oligui Nguéma (BCON) est déjà accusée de menacer le vivre ensemble et l’unité nationale. Son tort: avoir des Fangs comme fondateurs.
La présidente du sénat, Mme Paulette Missambo, a été prise à partie récemment pour avoir implanté Ossimane à Lastoursville, dans le département de Mulundu, dans l’Ogooue-Lolo (sud-est). Elle n’aurait pas dû amener une association fang en pays ndzébi.
Or, il n’y a pas formation plus tribaliste et anti-fang que le PDG, qui régente la vie politique au Gabon depuis sa création, le 12 mars 1968. Aucun Fang n’a jamais été nommé secrétaire général du PDG, poste réservé en exclusivité aux Ndzebis sous le fallacieux prétexte que le PDG a été crée sur les bords de la Bouenguidi, à Koula-Moutou, dans le chef-leu de la province de l’Ogoué-Lolo. Suffit-il qu’une formation politique soit créée dans un bled quelconque pour qu’elle devienne la propriété privée des ressortissants de la contrée en question?
En dépit de son caractère anti-fang affirmé, le PDG n’en compte pas moins de militants fangs même si ces derniers ne sont importants que dans les périodes électorales. Au Gabon, le repli identitaire est à géométrie variable. Il concerne uniquement les Fangs.
Le retour de bâton
Les vieux réflexes acquis sous Omar Bongo Ondimba sont toujours presents. On serait même tenté de trouver des circonstances atténuantes à ceux qui en portent encore les stigmates. Après un lavage de cerveau qui a duré plus d’un demi-siècle, il est presque normal, pour eux, que l’exclusion des Fangs constitue la norme de la bonne gouvernance au Gabon. Ne pas s’y conformer serait faire fausse route. Il va falloir pourtant que tout ce beau monde change de logiciel pour s’adapter à la nouvelle donne et aux temps qui changent.
Omar Bongo Ondimba croyait nuire aux Fangs avec sa politique d’exclusion mais il a plutôt fait beaucoup de tort au Gabon et aux Gabonais, qui vivent aujourd’hui dans une précarité inadmissible pour des citoyens d’un pays aussi richement pourvu en ressources naturelles. Alors que l’attention du plus grand nombre était focalisée sur les Fangs, placés sous étroite surveillance des autres ethnies,
Omar Bongo Ondimba pouvait se reposer sur ses lauriers et en faire à sa guise au sommet de l’Etat. Personne ne se souciait des malversations et des détournements des deniers publics qui s’opéraient, parfois avec son aval. La richesse quittait le pays pour les réseaux de la Françafrique. Le clan Bongo se partageait le reste. Les Gabonais, impuissants, n’ont pu que constater les dégâts. Aveuglés par le tribalisme, ils ont négligé la vigilance et la sagacité, qui s’imposent face à un pouvoir cleptocrate, parce que la pauvreté, elle, ne choisit pas son ethnie. Elle sévit sans distinction.
L’ère Oligui Nguéma
La réparation du tissu social, endommagé par plus d’un demi-siècle de régime Bongo-PDG, est parmi les chantiers les plus coriaces qui attendent le général de brigade, BCON, s’il est appelé à conduire les destinées du Gabon, au lendemain de l’élection présidentielle du 12 avril 2025
La tâche est d’autant plus ardue que les dégâts sont énormes. Erigé en modèle de gouvernance, le tribalisme anti-fang a été préjudiciable au vivre ensemble et au sentiment national. Il a favorisé le repli identitaire qui retarde la marche vers l’unité nationale et le progrès.
L’avènement à la magistrature suprême de BCON pourrait être une opportunité à saisir pour, non seulement soigner et panser les plaies ouvertes, réconcilier les Gabonais avec eux-mêmes, mais également pour se consacrer résolument au développement du pays.
En plus d’incarner la rigueur militaire, BCON se présente comme une alternative crédible, un facilitateur susceptible de rapprocher deux communautés, les Fangs et les non-Fangs (les Bilops) qu’Omar Bongo Ondimba s’est employé, de toutes ses forces, à opposer, tout au long de son magistère de plus d’un demi-siècle à la tête du Gabon.
BCON apparaît comme l’homme de la situation car il incarne les deux faces de Janus: un côté paternel fang et une branche maternelle non fang (Téké).
Pour entrer dans les bonnes grâces d’Omar Bongo Ondimba, il fallait présenter patte blanche: dénigrer les Fangs. C’était une preuve de fidélité parmi tant d’autres, la porte ouverte à de multiples avantages et privilèges.
En revanche, personne ne pourra convertir Brice Clotaire Oligui Nguéma (BCON) à la détestation des Fangs, ses parents paternels, non plus à celle des autres communautés de sa branche maternelle téké et alliés.
Alors, tous ceux qui trouvaient leur compte dans l’exclusion des Fangs doivent désormais revoir leur copie, apprendre à collaborer et composer avec eux, surtout s’attendre à les retrouver dans des positions inhabituelles. Pour se développer, le Gabon a besoin de toutes ses filles et de tous ses fils.
Chaque citoyen doit apporter sa pierre à l’œuvre de construction nationale, en fonction de ses compétences et non en fonction de son appartenance ethnique ou de son origine géographique: l’homme qu’il faut à la place qu’il faut. C’est peut-être à ce niveau que les Fangs font si peur et que certains souhaitent leur exclusion.
L’actuel président de la transition est bien placé pour rapprocher et réconcilier les Gabonais, à condition qu’il se démarque des extrémistes de tous bords et s’entoure de vrais patriotes.
BCON a déjà engagé des réformes prometteuses. La levée des couleurs suivie du chant de l’hymne national, au début et à la fin de chaque semaine, est désormais obligatoire, dans les administrations et les établissements scolaires. Elle participe de l’éveil de la conscience civique et citoyenne.
Il a également commencé à lever l’embargo, instauré par Omar Bongo ondimba, interdisant l’accès des Fangs, surtout, à certaines fonctions et responsabilités dans des administrations bien précises.
Tout à ses calculs pour conserver le pouvoir, Omar Bongo Ondimba a oublié de construire et développer le Gabon. 64 après son indépendance, le pays manque de toutes les infrastructures qui sont à la base du développement: routes, autoroutes, aéroports, ports, ponts (…). Autant de chantiers qui attendent BCON.
L’amélioration des conditions de vie des citoyens est également un défi de taille qu’il lui faut relever.
Le logement, l’emploi, l’éducation, la santé, l’agriculture (…) ont également été très négligés par Omar Bongo Ondimba. La relance de tous ces secteurs va nécessiter d’importantes ressources financières dont la mobilisation incombe désormais à BCON, qui doit impulser une autre gouvernance pour sortir le pays du marasme.
Le prix Dag Hammaskjõld
Omar Bongo Ondimba a réussi à tromper et à corrompre tout le monde, sauf les membres du jury de Stockholm, qui décernent le Prix Nobel de la paix, une distinction derrière laquelle courait le défunt président gabonais.
Omar Bongo Ondimba aurait tellement voulu laisser son nom dans l’histoire, comme Nelson Mandela ou Desmond Tutu, mais la communauté internationale lui a refusé cet insigne honneur. Le jury du Nobel était informé de sa mauvaise gouvernance, son népotisme, son autoritarisme, ses dérives… En clair, Omar Bongo Ondimba ne présentait aucun critère d’éligibilivté au prix Nobel de la paix. Il ne suffisait pas seulement d’assurer, comme il l’a fait, la médiation dans quelques conflits africains (Angola, Centrafrique, Tchad..).
Toutefois, ses efforts, inaboutis d’ailleurs, en vue du règlement des conflits ont été récompensés du prix de la recherche de la paix Dag Hammarskjöld, du nom d’un secrétaire général des Nations unies, qui a trouvé une mort tragique, dans un accident d’avion, en septembre 1961
Les négociations dans lesquelles le président Omar Bongo s’est impliqué ont englouti des centaines de millions de dollars, qui auraient pu servir au développement du Gabon.