Décédé le 14 février dernier au Centre hospitalier universitaire de Libreville, où il était interné depuis trois semaines déjà, suite à un accident vasculaire cérébral, le décès de Jean Pascal Ndong, figure emblématique du paysage médiatique gabonais, a bouleversé la corporation. Pyramidmediasgabon a recueilli quelques témoignages de ses confrères. De François Ndjimbi, à Jean-Yves Ntoutoume, en passant par David Ella Mintsa et Louis Philipe Mbadinga, jusqu’à Adrien Wayi Lewy, tous reconnaissent en l’illustre disparu, un journaliste rigoureux, talentueux et défenseur de la liberté de la presse. Témoignages.
François Ndjimbi, directeur de publication de Gabonreview
« J’ai connu Jean Pascal Ndong à Ikassa, un restaurant de Jacky Cochon. Le samedi, il y avait souvent un orchestre qui jouait et un gars qui chantait et que j’applaudissais. Il jouait de la guitare et quelqu’un me dit « il est journaliste comme toi ». Nous nous sommes connus comme ça. Je l’ai approché et puis après j’apprends qu’a l’époque il est à Radio Nostalgie Gabon.
Je le retrouve à Tv+ et là je découvre un professionnel, j’aimais beaucoup parce que TV+ était dans ma sensibilité idéologique, audacieuse, le ton qu’avait TV+ au début a été impulsé par Jean Pascal, on a eu des atomes crochus au niveau idéologique et tout, à l’époque, Mba Obame qui était le promoteur n’était pas encore passé à l’opposition. Il était président de l’Union de la presse francophone et grâce à Jean Yves Ntoutoume qui me ramène encore vers lui et l’amitié se renforce. Puisque j’entre à l’UPF et je participe aux activités de la section gabonaise.
J’ai toujours pensé que les meilleurs journalistes sont dans la presse écrite, mais à la vérité j’ai beaucoup de respect pour le travail de Jean Pascal Ndong. Je l’ai perdu de vue, il apparaissait de moins en moins dans les activités de l’UPF. Mais je crois qu’il a eu souci matrimonial, sa femme vivait à l’étranger parce qu’elle y travaillait au PNUD puis, à la BAD et lui ici, peut être que son union matrimoniale l’avait affecté. Mais je pense qu’il s’est mis à écluser. Je ne reconnaissais plus le Jean Pascal que j’avais connu, rigoureux, sobre, que j’aimais beaucoup, un peu vantard. Il laisse de lui l’image d’un professionnel, un gars qui se voulait rigoureux et qui a osé une aventure ».
Jean Yves Ntoutoume, directeur de publication du journal Le Temps, ancien secrétaire général et president de la section Gabon de l’UPF.
« Depuis 2003, lorsqu’il est devenu président de la section Gabon de l’Union internationale de la presse francophone, il est venu personnellement à mon domicile pour me dire qu’il voulait faire de moi, le secrétaire général de la section. J’ai accepté, et jusqu’à son départ de la section en 2016, lorsque je le remplace à la tête de la section, nous sommes restés très proches. Pendant plus de 13 ans, on a travaillé sur le plan professionnel. Nous avons tissé des liens amicaux. Nous étions déjà des frères. Sur le plan international, Jean Pascal et moi avions représenté le pays dans les grandes conférences et autres séminaires consacrés aux journalistes. C’est dans ce cadre que nous avons créé, le Forum des rédacteurs des médias de l’Afrique centrale à N’Djamena, en 2011, et le réseau panafricain des journalistes à Brazzaville la même année.
Son décès est une grande perte pour la corporation ».
David Ella Mintsa, journaliste, ancien directeur général de Gabon Télévisions
« J’ai appris hier soir la triste nouvelle du décès de Jean Pascal NDONG, Journaliste reconnu pour son talent et son professionnalisme. Jean Pascal NDONG aura marqué le monde des médias par son engagement résolu pour la promotion de la liberté d’expression et pour avoir oeuvré avec acharnement pour la formation des journalistes gabonais. A cet égard , il n’hésitait pas à saisir la moindre opportunité qui s’offrait à lui pour organiser des formations au profit des confrères aussi bien dans le cadre de ses responsabilités au sein de la section gabonaise de l’Union Internationale de la presse francophone qu’en qualité de Président du réseau des journalistes en développement du Programme des Nations unies pour le développement ( PNUD). Aussi, au moment où il nous quitte, il me paraît utile de rendre témoignage de l’œuvre considérable qu’il a accomplie pour l’essor de la presse gabonaise. Tout au long de son parcours professionnel, il a permis l’éclosion de jeunes talents. Partout où il est passé, notamment à Radio Nostalgie à TV+ et enfin à Gabon 24, il a, à chaque fois manifesté un grand intérêt pour l’encadrement des jeunes. Mais au-delà du professionnel expérimenté, il me plaît aussi d’évoquer l’ami et le frère qu’il a été pour notre génération qui a fait « intrusion » dans le monde de la communication au tout début des années 90.
En effet, c’est en 1993, à la faveur du lancement par Feu André MBA OBAME d’une nouvelle radio dénommée « Radio Fréquence 3 » que je fis la rencontre de Jean Pascal NDONG. Très vite sous la houlette d’encadreurs chevronnés comme Ledoux, Ronny MBA MINKO ou encore Omer Léance REMBENDAMBYA, nous fîmes, avec d’autres jeunes plein de talents, nos premiers pas dans la profession.
Au-delà des enjeux professionnels, nous formions une bande de copains qui partageaient la même passion pour la Radio et plus tard pour la Télévision. Regis MASSIMBA, Jonathan NTOUTOUME, Prince MFOUL NZE, David ELLA MINTSA, tous avons été, avec Jean Pascal NDONG, façonnés dans ce moule médiatique des années de braise, puis chacun a pris, avec des fortunes diverses, sa propre trajectoire ».
Louis Philipe Mbadinga, journaliste à l’Agence gabonaise de presse
« Jean Pascal, partir un 14 février, tu as réussi à entrer définitivement dans nos cœurs !
Comme certains de tes confrères de Tv+, dont mon très estimé Ismael Obiang Nzé, je t’ai d’abord suivi à l’écran… Puis, après mon entrée dans le métier notre rencontre s’est faite en partance pour Lambaréné, dans le cadre de l’Union de la presse francophone (UPF), alors que tu dirigeais la section Gabon en 2010. Un séjour inoubliable au cours duquel j’ai connu des Kadors du métier de l’époque, comme François Ndjimbi, Jean Romain Fanguinoveny, Jean Yves Ntoutoume, Guy Pierre Biteghe, Ignace Bodou, le défunt Placide Moulakou, entre autres.
Alors, Directeur général de Radio Nostalgie, tu étais des plus enviables. Qui roulait en Mercedes ou en BMW parmi les journalistes ? A la même époque j’ai fait la connaissance de celle qui était ton épouse lors d’un voyage à Dakar en 2010. C’est donc tout naturellement que nos liens se sont renforcés, ce d’autant que, 6 ans plus tard, en août 2016, tu nous a rejoint à Gabon 24 que nous avions lancé en mai.
Là, tu as été un Directeur adjoint de l’information très dur, très rigoureux. Certains le ressentaient comme un excès de zèle, voire de la méchanceté, mais c’était la rigueur nécessaire pour un travail bien fait. Le libertaire que je suis, formé en définitive dans l’environnement des médias internationaux, était souvent réticent à cette rigueur martiale. Je t’en ai voulu un peu, car j’en bavais de ces reproches interminables sur des gamines et des gamins, à peine sortis des écoles, qui font partie aujourd’hui des meilleures pépites du moment. Plus de huit ans plus tard, au regard de la qualité de certains contenus éditoriaux, je te donne raison : la vielle école est la meilleure. Le plus curieux est que nous nous retrouvions dans des apéros after work, partageant de fous rires. Jusqu’il y a 3 ans encore…
Puis on s’est revu il y a moins de 2 ans pour que tu remettes le pied à l’étrier, lors d’une de tes convalescences, à la veille de la présidentielle de 2023. Je pensais à une véritable rémission. Puis ce fut la distance et le silence de la maladie. Je m’en veux d’avoir été impuissant, comme c’est souvent le cas dans ces situations extrêmes…Je t’en veux d’être parti si tôt…mais va en paix, car la peine de ton départ pour nous, est un soulagement pour toi…
L’église était, tous les Dimanches pour toi, un rituel sacré. Que notre Seigneur Jésus-Christ t’accueille dans son royaume ! A votsu ! »
Adrien Wayi Lewy, Journaliste, ancien directeur de l’information de Radio Congo, président du Réseau panafricain des journalistes/ Congo Brazzaville
« Mon très cher Pascal, pendant plus de deux décennies, toi de la République gabonaise, et moi, du Congo Brazzaville, avions entretenu un commerce intellectuel très fécond. Ce qui a donné naissance à la création du Réseau panafricain des journalistes, à Brazzaville, le 22 février 2011. Mais, dans ce commerce intellectuel, ayant pour vocation de promouvoir une presse africaine citoyenne, c’est-à-dire celle qui parle aussi de l’Afrique, en marche vers le développement, nous n’étions pas seuls. A nos côtés, nous étions en intelligence aussi avec Annie Chantal Bikene et Jean Ntoutoume de la République gabonaise ; David Atemkeng du Cameroun; Fran Esono de la Guinée Équatoriale; Aline Assonkpong et Damien Hounsou du Bénin ; Abdou Gningue de la République du Sénégal, Bibiche Muzeke, Monulphe Vandhrich Bosso et Luc Roger Mbala de la République démocratique du Congo ; Sandrine Atipo, Clémence Mbassi du Congo Brazzaville… et j’en oublie forcement.
Bien aimé Jean Pascal, l’ordre d’arriver sur terre, n’impliquant pas rationnellement l’ordre de départ sous terre, les membres du Réseau panafricain des journalistes, par la voix, tous écartelés entre l’absurde et mystère, le tout dans une harmonie de paradoxe, choisissent l’option de ne pas te pleurer, mais décident, uniment, de te célébrer, pour tes loyers et sacres services rendus à la presse africaine. Adieu l’artiste ».
Propos recueillis par Boris Biyoghe