Après l’effervescence du 30 août 2024 liée à la commémoration du coup des militaires sur le régime d’Ali Bongo et de son PDG new-look bariolé, le trajet qui reste à effectuer jusqu’aux prochaines échéances politiques cruciales sera sûrement plus tortueux que le premier qui était sûrement plus aplani et moins étroit. Et pour cause : les politiciens opposés se refaisaient une cuirasse pour les premiers assauts.
Par Jean Hilaire Biteghe
Le contraste était gros entre la célébration de la date de l’indépendance et celle de la prise de pouvoir par les militaires. Même si une image commune dominait les deux festivités, à savoir le général Oligui Nguema. Panneaux, gadgets, hommages des médias et patati-patata, à l’homme fort du 30 août 2023 ont coloré le pays tout entier. Ce n’était pas forcément à critiquer ou encore moins à condamner si cela ne revêtait pas une certaine propagande grossière de certaines cellules de maquillage scénique qui avait pour seul rôle de faire plaisir au Général Président de la transition. Même s’il fallait grossir et forcer le trait.
Le 30 août 2024 a complètement » fumé » le 17 août de la même année. Les institutions de la république, les instances de la transition (ce qui est tout à fait normal) à la tête desquelles le CTRI et toutes ses troupes et courtisans se sont affairés en concurrence pour être le plus faisant, entraînant ainsi le petit peuple en manque d’oxygène dans ces tourments enivrants des cultes. Le mois d’août 2024 a connu, entre délestages d’électricité et pavoisement aux couleurs des militaires conquérants, son apogée de fastes.
Ceci dit, le moment est venu de regarder et envisager autrement l’avenir de ce pouvoir du 30 août 2023. Car rien ne sera plus comme avant dans la tête du peuple. Le moment de l’euphorie s’estompe rapidement, laissant place à la lucidité et à la réalité. Le Gabonais a repris sa balance Roberval pour mettre sur un plateau les annonces de 2023 et de l’autre le réel changement en sa faveur. Le peuple a repris ses loupes, afin de scruter dans toutes les coutures, les possibilités des lendemains meilleurs pour espérer un essor vers le mieux être individuel et collectif. « Faites-nous confiance, car le bonheur arrivera à qui sait attendre », ne sera plus entendu cette fois-ci. Le gabonais veut voir le contenu de son assiette changer à souhait, il veut une véritable politique sociale avec des opportunités diverses.
Le CTRI doit maintenant comprendre que la gestion de la politique de la transition actuelle est tout mais plus militaire et qu’il sera jugé politiquement avec des instruments et mesures politiques. Puisque les militaires ont décidé de se lancer en politique, ce que le peuple peut bien comprendre dans le cas du Gabon où les civils politiciens ont tout saccagé enterrant très profondément tous les espoirs des filles et fils du pays, qu’ils le fassent tout en sachant que le monde politique n’est pas un long fleuve tranquille et qu’il se doivent de voir les choses autrement. Leur formation de soldats devrait être un atout pour voir à bonne distance, les écueils sur le trajet de navigation. Si le civil veut toujours contourner les obstacles, le militaire lui, ne s’encombrera pas de cette finesse inopérante, il n’hésitera point à le détruire.
Le peuple attend maintenant un signal fort lié au changement, certes on peut construire quelque chose de beau, de solide et de nouveau avec du vieux mais cela dépend de la matière qui a vieilli. Si c’est du marbre, du bronze et bien d’autres de la même espèce de résistance, la durabilité et la valeur resteront indiscutables. Mais jamais l’on ne pourra faire du neuf ni du beau avec du vieux pourri.
Le peuple, en réalité, ne suit plus véritablement dans sa large majorité le CTRI. Ceux qui sont choisis pour apporter le changement dans la gestion de cette transition et qui ont été, jusqu’à la veille des évènements du 30 août 2023, dans la machine infernale qui devait être impérativement changée justifiant la décision de l’armée de mettre fin à cette triste réalité, se retrouvent aujourd’hui aux avant-postes, arguant qu’ils peuvent être ceux-là qui vont amener le changement de paradigme. Peuvent-ils inspirer confiance vis à vis du peuple en leur demandant d’adhérer à un projet, une vision, une politique à l’exemple de l’adoption de la constitution, challenge premier du CTRI ? Non, pas du tout bien au contraire ce sera un véritable repoussoir.
Le pouvoir de la transition doit écouter le peuple, mieux communiquer envers le peuple et expliquer à ce peuple qui repart dans le scepticisme.
Le Président Brice Clotaire Oligui Nguema doit maintenant s’entourer des hommes de convictions et de vision. Il y en a dans le pays et pas forcément à l’extérieur. La transition exige du courage et de la fidélité. Pas de lèche-bottes et autres flatteurs, car elle souffre malheureusement du manque de légitimité, quelle que soit l’adhésion informelle dont elle peut bénéficier. Le schéma de la transition aussi atypique et novateur soit-il, souffre aussi d’acteurs dont les profils répondent. Le CTRI doit surprendre positivement dans les choix de ceux qui doivent l’accompagner, finis les choix d’arrangements filiales ou de petites récompenses extra-compétence. Le pouvoir des militaires devrait être couvert d’un manteau de froideur et celui du Gabon plus que partout ailleurs. Plus d’un demi-siècle de pouvoir uniforme ne s’efface pas la fleur entre les dents.
Pas besoin de couronne ou de trompette pour célébrer les réformateurs et les rebatisseurs, car ils détruisent pour rebâtir et qui dit rebâtir dit grincements de dents pour les responsables des œuvres à détruire. Curieusement au pays d’Oligui Nguema, tous les auteurs de mauvaises à détruire rient à gorges déployées et applaudissent à se rompre les phalanges. Ce qui laisse le petit peuple dubitatif, voire inquiet se demandant s’il a la bonne lecture de la transition.
Oligui Nguema n’est pas un chef d’État comme les autres. Il n’est pas l’émanation des partis politiques alors, que l’on cesse de l’amener de manière finaude à penser que les hommes politiques, cireurs de bottes sont ceux-là qui lui donneront le sésame de l’après transition, car dans la configuration actuelle des choses, il faut prendre des hypothèses basées sur la suite à donner à la transition au risque d’aboyer avec des loups.
Je suis peut-être minoritaire dans cette manière de voir les choses, mais je me console en sachant que la vérité est souvent entre les mains d’une minorité. Monsieur le Président de la transition, ne soyez pas déconnecté et continuez à ne pas agir de manière robotisée, car beaucoup autour de vous, vous font croire qu’ils peuvent produire des hypothèses qu’ils n’ont jamais pu régler vis à vis du peuple gabonais. C’est à vous de voir.
Respect Général !
Journaliste d’investigations, lauréats international, dunkerque, bull international URTI