Acteur politique, leader du Mouvement patriotique Chrétien, Alain Zue Ndemezo, donne, dans cet entretien accordé à notre rédaction, ses impressions sur le futur dialogue national prévu début avril prochain. Ses préoccupations et ses attentes. Il fait également allusion aux assises passées. Souhaitant une conférence nationale souveraine, l’homme fustige le choix du gouvernement qui vise à dénaturer le format de ces assises. Lecture!
Le Temps : Le dialogue national ouvre ses travaux début avril prochain. Ces assises doivent durer un mois, selon la ministre de la Réforme de l’Etat et des Institutions. Pour une grande opinion, ce rendez-vous ne peut être comparable aux précédents. Concrètement, qu’est-ce que vous attendez de ces assises ?
Alain Zue Ndemezo: Je vous remercie de m’avoir accordé l’occasion de m’exprimer sur l’organisation du prochain Dialogue Politique et, surtout, de l’avenir de notre pays le Gabon.
Pour répondre à votre question, je dirais qu’il est prétentieux de dire avec assurance sur une question politique que le Dialogue prochain, celui de la transition, serait incomparable aux précédentes assises politiques de même nature, qui ont été organisées sous Omar et Ali BONGO , notamment de la conférence nationale de 1990, en passant par les accords de Paris, les accords d’Arambo, les accords d’Angondjé et la Concertation politique de 2023.
Je le dis d’autant plus que le Gabon n’a jamais connu une situation aussi chaotique sur les plans politique, économique et social comme celle que nous vivons aujourd’hui. Si avec l’avènement du multipartisme en 1990, certaines questions avaient trouvé des solutions diverses et apporté un petit apaisement, depuis 2009, les Gabonais ont de plus en plus du mal à se reconnaître dans les choix et décisions de leurs dirigeants. Le prochain Dialogue Politique ne pourrait être différent qu’à travers les résolutions qui seront prises et leur effet positif sur le quotidien des compatriotes.
Pour certains, ces assises ne doivent pas être organisées par le gouvernement, mais plutôt par une Commission indépendante. Sauf que le président de la Transition a déjà choisi l’archevêque de Libreville pour présider le directoire de ces assises. Que pensez-vous de ce choix et de l’organisation mise en place ?
Le choix de l’archevêque de Libreville est effectivement une garantie de l’indépendance avec laquelle le Dialogue doit être organisé, non seulement sur le plan théorique mais aussi sur le plan pratique. Il serait judicieux, je dirais sage et intelligent pour le Président de la République de laisser l’archevêque et les membres de son bureau, choisis par lui en tenant compte de leur moralité et leurs différentes expériences sur les plans politique, économique et socio culturel, de travailler en toute sérénité pour la réussite de cette rencontre dont les résolutions seront attendues par le peuple tout entier Ma modeste expérience, pour avoir pris part au Dialogue d’Arambo et à celui d’Agondje le permettent de croire qu’en impliquant le gouvernement dans un tel processus, le CTRI sort totalement de la voie sur laquelle les Gabonais ont applaudi à phalanges brisées, le coup de la Libération du 30 Août 2023.
Pour sa tenue, le gouvernement table sur 500 à 1000 participants. Tout comme le budget pour son organisation est fixé entre 3 à 5 milliards de Fcfa. Vos impressions ?
La sortie de route dont je fais allusion à la précédente question se justifie par ce choix du gouvernement qui vise à dénaturer le format que doit avoir ce Dialogue. Comment peut-on concevoir qu’on annonce un dialogue inclusif et que l’on exclut plus de 90% de ceux qui ont manifesté indirectement par des propositions, leur désir d’y participer physiquement ? Qu’est ce qui justifie ce choix du gouvernement de ne retenir qu’une petite frange de gabonais, d’ailleurs choisis sur la base de critères inconnus pour parler et décider au nom du plus grand nombre? Voyez-vous par où commenceront les problèmes du CTRI? Notre souhait est d’avoir une conférence nationale inclusive et Souveraine. Car il s’agit une fois de plus de l’avenir du Pays et cela n’a pas de prix.
Pourquoi la conférence nationale souveraine ?
Vous savez, un dialogue est une discussion qui se fait entre deux parties. Cela peut être entre l’opposition et la majorité. Dans le cas qui est le nôtre ou le Président de la République dit qu’il n’y a plus ni opposition, ni majorité, alors que le pouvoir actuel est lui-même issu d’un coup d’État, il en résulte que nous ne pouvons plus parler de Dialogue mais de conférence nationale. Et de facto, le pouvoir revenant au peuple, cette conférence ne peut avoir de véritable poids qu’en étant souveraine. D’où la demande d’une conférence nationale souveraine.
Fin avril prochain, qu’espérez-vous voir dans les conclusions finales de ce dialogue national?
Au sortir de cette conférence, trois choses essentielles décideront de notre avenir. Premièrement, la constitution qui sera l’émanation d’une conférence et qui garantira le fonctionnement des institutions, donc de la vie de la nation.
Ensuite, la volonté politique du Président de la République de garantir le respect de la Démocratie, l’État de droit et l’égalité des citoyens dans la prise des décisions qui accompagneront la marche du pays.
Enfin, la Restauration des valeurs sur lesquelles sera fondée notre identité, l’identité du Gabon.
Votre mot de la fin
Mon mot de fin s’adresse au Président de la République. Monsieur le Président, voici venu votre Premier test politique après le coup de Libération. Il va s’agir à travers le dialogue, de montrer aux Gabonais de quel côté vous vous situez. Pour ma part, je vous prie de donner un signal fort à ceux qui doutent déjà de vous et de vos ambitions pour le Gabon. Aussi, je propose que ce Dialogue soit Souverain et ouvert à tous, sans exclusion.
Au peuple gabonais, restons vigilants et mobilisés. L’heure n’est ni aux invectives, ni à la confusion encore moins au découragement.
Le Mouvement Patriotique Chrétien exige que cette conférence nationale soit Souveraine.
Propos recueillis par Boris Biyoghe