Pratiques aux antipodes de l’éthique administrative, recrutements sulfureux, fonctionnaires fantômes… La fonction publique gabonaise est devenue ce grand mammouth à l’intérieur duquel il est difficile, voire impossible de donner le vrai chiffre de ceux qui y émargent. Tellement, l’ancien régime en a fait un objet politique et de chantage à l’endroit de tous ceux qui voulaient se mettre à l’abri d’un emploi stable.
Les changements intervenus au ministère de la fonction publique, au soir du conseil des ministres du 8 novembre dernier, vont-ils enfin éclaircir une administration masquée par un brouillard de magouilles et autres passe-droits? C’est la question que l’on se pose au regard de l’ampleur des incongruités enregistrées à la fonction publique gabonaise depuis des lustres, où l’on ignore combien d’agents y émargent réellement. Le chiffre annoncé sous l’ancien régime, soit : 101.045 agents publics, est une pilule difficile à avaler en ce temps de transition.
Annoncé pour être effectif le 31 juillet 2017, le gel de recrutement avait initialement un délai de 12 mois. Il avait pour but, selon le gouvernement de l’époque, de s’arrimer à la norme communautaire Cemac qui indique que les salaires de la fonction publique dans cet espace communautaire, ne devraient pas excéder 35% des recettes fiscales. Or, le Gabon à cette époque-là avait déjà franchi les 65% des recettes collectées. Le défi était donc d’inverser la tendance en situant, au bout de trois ans, la masse salariale à moins de 40%.
Au lieu d’un an, le gel de recrutement, des concours aux écoles liées à la fonction publique, des avancements, et autres, a dépassé 6 ans. Mieux, les fonctionnaires qui sont allés à la retraite dans la foulée de cette décision triment aussi à percevoir leurs pensions. Depuis plus de six ans, ils sont en pré pension. Un scandale administratif à l’encontre des personnes qui ont servi l’état et le pays pendant de longues années de travail. Et comme si cela ne suffisait pas, l’absence de l’arrimage des pensions au nouveau système de rémunération, ne fait qu’accentuer la misère de ces nombreux anciens serviteurs de l’état.
Pendant ce temps, par des magouilles et autres passe-droits, plusieurs personnes ont continué à rallonger l’interminable liste des fonctionnaires. Mieux, d’autres, par milliers, vivent hors du Gabon, tout en touchant indument les salaires de fonctionnaires. Au grand dam des jeunes diplômés qui frappent, tout aussi par milliers, les portes de l’emploi.
On parle de plus de 40.000 jeunes à avoir déposé les dossiers, quelques semaines seulement après que le régime de la transition a levé la mesure relative au gel de recrutement et son corollaire.
Nelson Tchimbakala