Quand certains gabonais voient en cette opération, la reprise de l’histoire biblique ou mythologique hébraïque de » vendu aux marchands dans le désert par ses propres frères pour se retrouver sous les lambris du palais de Pharaon ». Et si le Gabon était le Joseph de cette histoire ? ». D’autres, comme le firent lors du retour du peuple hébreu, sorti quelques instants seulement de la captivité de l’Égypte pharaonique, dans le désert, sur la route de la terre promise, jugent déjà l’itinéraire du bateau Gabon hasardeux voire dangereux prévoyant même un naufrage inévitable car, pour eux, le bateau Gabon entre dans la zone de turbulences, comme le firent toutes les embarcations qui prenaient le cap entre le gouffre de Charybde et l’écueil de scylla, une autre allusion à la mythologie romaine. Qu’en est-il vraiment ?
À moins de cent (100) jours de la prise de pouvoir par les forces de défense et de sécurité du Gabon, le microcosme politique gabonais ne semble plus être ce ciel nuageux où incertitudes et assurances se confondaient, mais plutôt un jardin d’une multitude de variétés de fleurs qui accentue la beauté de l’œuvre. L’éveil des consciences polychromes ouvre un horizon presque infini à l’appropriation de la nation et à la fierté d’appartenir à un seul peuple, une seule nation et à un même destin. Toutes les composantes de la Nation Gabon vont chacune de sa lecture du présent et du futur, avec son regard, son interprétation des actes et avec ses émotions. Tout le monde se dit artisan et artiste du Gabon sont-ils rêve mais malheureusement, très peu sont des acteurs froids du schéma à mettre en place, pas par refus mais par le caractère exceptionnel du tri, ce chevalier des temps et des circonstances. Cela dit, il faudrait
affirmer avec force que, sans y être formellement reconnu ou identifié, tout gabonais est architecte de son Gabon meilleur, surtout ceux qui ont longtemps rêvé de nouveaux paradigmes parfaitement applicables avec, profondément ancré dans le plus profond de leurs âmes : le Gabon immortel, digne d’envies et non l’égo, le nombrilisme et le » tout pour moi et rien pour les autres « .
Le Gabon immortel
Le 30 août 2023 a sonné le glas pour tous ceux qui sont restés inutilisés, pourtant ne demandant qu’à l’être mais beaucoup de par leur invisibilité non intentionnelle et circonstanciée, ont vite déchanté, voyant le monde sous leurs propres prismes, voilant ainsi leur lucidité à la lecture vraie des réalités du moment et toujours de manière inconsciente engendrant ainsi une altération de leurs jugements. Il n’est nullement question de mauvaise foi pour une bonne partie d’entre eux, mais du résultat des éclaboussures de leur zèle presque effréné de la volonté de participer pleinement, aux premières heures du nouveau Gabon et à la mise en place de la première pierre de l’œuvre combien de fois titanesque qui devrait sortir des ruines que le Gabon leur pays est devenu. Certes, cette émotion est humaine mais pas véritablement constructif car, à l’aune d’un nouveau Gabon, le concept qui devrait s’imposer à tous n’est pas celui des gabonais reniés mais plutôt celui de gabonais patriote et mentalement inviolable, sachant que notre bonheur du moment devrait être mesuré à ce qui était notre état d’esprit et de désespoir, la veille de ce 30 août 2023.
Impulser une vision et une dynamique nouvelles
Quelques heures seulement après cette proclamation éhontée de l’élection présidentielle, une minorité de la population à savoir: l’armée, s’est décidée d’arrêter l’infernal processus aux couleurs funestes vécu par le peuple et ceci, à leurs risques et périls incalculables, pour rentrer dans l’histoire. Et d’ailleurs, ce sont les minorités qui font toujours l’histoire comme le disait Lénine en son temps. Il est peut-être vrai que tout n’est pas limpide aux yeux de beaucoup de compatriotes, dans le cheminement politique des militaires au pouvoir, ce sont eux-mêmes qui ont le tracé de leur chemin et le temps que durerait la transition qui est la première du genre dans ce pays. Cela ne s’adapte sûrement pas à l’imaginaire d’un bon nombre de compatriotes eux aussi et à leurs manières, soucieux du devenir de notre pays et surtout quand le rétroviseur est là pour leur rappeler d’où nous sortons.
L’humilité recommande alors que, tous ceux qui sont aujourd’hui détenteurs des rênes du pouvoir les entendent et, aussi dans une mesure raisonnable, les comprennent, tout comme ces sceptiques (pas plus impénitents que le sont aussi les optimistes) doivent savoir que c’est l’art de l’utilisation qui commande l’art de la fabrication, en d’autres termes, c’est Brice Clotaire Oligui Nguema et les militaires qui l’ont accompagné qui savent qui rentre dans leur schéma pour accomplir leur vision.
Quand nous voyons à quel niveau de dégradation est notre pays, soit il faut le restructurer en profondeur, c’est à dire, changer, redresser, impulser une vision et une dynamique nouvelles, soit il faut tout refaire et tout refaire signifie ne plus tenir compte de ce qui fut y compris les auteurs de la plongée dans les abysses, c’est le principe de la table rase , selon Richelieu à savoir, tout détruire, créer le chaos et tout recommencer sur la base de rien. Les militaires du 30 août 2023 ont opté pour la restructuration et non le chaos et c’est ce choix qui suscite chez certains compatriotes qui voient rouge, une logorrhée de principes voire des reproches qui ignorent le réel, et Brice Clotaire Oligui Nguema a fait son choix, qui pour le journaliste que je suis, observateur averti de la vie politique de mon pays semble être celui-ci : il vaut mieux avoir tort avec le peuple que d’avoir raison avec tous ceux qui ont mis entre parenthèses le Gabon et l’avenir de ses enfants nonobstant le fait que certains qui sont à l’origine de cette descente aux enfers des gabonais sont aussi ceux qui savent le code de la remontée de cet ascenseur.
Les militaires savent que leur mission repose sur deux piliers à savoir : l’ordre et la justice. L’ordre étant symétrique et la justice humaine car s’appliquant aux hommes, la spéculation n’a donc pas beaucoup de place et une fois l’ordre et la justice instaurés, le peuple protégera sa souveraineté et quand le peuple couve véritablement sa souveraineté, aucun élément extérieur ne peut venir perturber sa quiétude, le Président de la transition ne le sait que trop bien. Il sait plus que quiconque qu’un pouvoir qui n’est pas proche du peuple n’est pas un pouvoir, c’est une usurpation et notre armée a ce potentiel, malgré les récriminations habituelles fruit de leur très grande proximité avec le peuple, bien que d’autres en font des choux gras, surtout les politiques et autres donneurs de leçons défroqués, dont les comportements confirment que les soupçons habituels se font plus acerbes quand les gens réussissent.
L’opération du 30 août 2023 est inédite et il est normal que beaucoup se perdent en conjectures, par exemple, en relevant que Oligui Nguema ne chauffe pas suffisamment son fauteuil à la présidence de la République, il est partout à la fois, dans le peuple, dans les faubourgs et sur les tapis des palais d’Afrique, qu’il ramène les mêmes ou presque du régime déchu alors que ces derniers doivent rendre des comptes, le CTRI est dans le populisme disent ceux-là qui ont perdu pied. Mais non, le CTRI fait jusque-là, de la politique participative, inclusive avec des acteurs qu’il connaît bien. Alors, qui est inquiet que le CTRI s’occupe des problèmes dénoncés par le bas peuple si ce n’est ceux-là mêmes qui les ont occasionnés. Que les politiques se montrent sous leurs meilleurs jours parce que c’est ce que le peuple attend, ce peuple longtemps abusé qui a toujours posé la question de savoir quel genre de Gabon voulons-nous laisser à nos enfants ? Nos enfants, cette jeunesse qui, sans elle, notre Gabon sera austère et sans espoir. Et pour y arriver, les politiciens devront laisser leurs cerveaux de politiciens au placard des racailles, ils pourront les reprendre peut-être à la fin de la transition, pour ceux qui ont juré de ne jamais s’en séparer et leurs dissonances cognitives les trahiront. La transition a besoin des hommes de raison car leur lecture est éclairée, par des hommes d’émotion avec leur lecture brouillée.
Avec les militaires, il ne faut jamais savoir à quoi s’attendre, il faut seulement suivre la cadence. Le peuple attend les 100 jours de la transition.
Jean Hilaires Biteghe Obame , journaliste d’investigations, lauréats international, dunkerque, bull international URTI