Weekend particulièrement violent que celui passé par les populations de la capitale gabonaise, à travers une opération de déguerpissement des commerces qui occupent le domaine public. Le gouvernement, initiateur de ce projet, dit vouloir embellir la capitale. Vous avez dit embellir!
Depuis plusieurs semaines, les rues de la capitale gabonaise Libreville, sont outrageusement envahies par de montagnes d’immondices, au point même de créer des embouteillages monstres à certains endroits. Un véritable Noël sous les ordures.
C’est à ce niveau qu’on attendait certainement le gouvernement qui gère ce dossier devenu un véritable talon d’Achille pour les pouvoirs publics. Mieux, les rues et ruelles de la capitale sont à un stade de dégradation qui choque.
Mais contre toute attente, ni les poubelles géantes qui continuent à dicter leur loi, n’ont jamais été inquiétées, ni les voies de communication de la capitale et ses environs n’ont connu un début de solution pour leur amélioration. Ce sont plutôt les engins militaires qui sont sortis de leur caserne pour surprendre les populations au petit matin du 17 décembre 2022. Non pas pour ramasser les ordures qui polluent l’atmosphère, mais pour casser les commerces qui occupent le « domaine public »… tout comme les ordures.
C’est une évidence, pour le gouvernement, vider les poubelles semble plus compliqué que casser les commerces.
Une opération qui, en plus d’être violente, n’a pas permis aux propriétaires de ces échoppes, de récupérer leurs biens. « J’ai tout perdu. Je n’ai rien pu récupérer, parce que j’ai été surpris », s’indigne l’une des victimes établie dans le sixième arrondissement de Libreville.
Vraisemblablement, tout se serait passé sans une communication de l’auteur du sulfureux projet. Mais qu’est-ce qui peut donc justifier une telle violence d’État à quelques jours de Noël et de la fête du nouvel an, au point que sans sommation, les commerces d’autrui volent autant en éclats ?
Pourquoi le gouvernement qui a l’obligation de protéger des citoyens, peut s’attaquer avec autant de violence aux populations qu’il est censé éduquer et protéger ? Pourquoi le gouvernement a manqué du minimum de pédagogie sur cette opération ? Certes, le domaine public appartient à l’État, mais humainement, cela justifie t-il une telle violence ? Ne pouvait-on pas passer par d’autres moyens, pour vider ces squatters ?
Parce que ailleurs, ce genre d’acte constitue souvent une étincelle qui, souvent, peut embraser un pays où une sous-région. Plus près de nous, en Tunisie, pour avoir cassé le commerce d’un jeune Tunisien en manque d’emploi, le Printemps arabe s’est invité. La suite, on la connait : plusieurs chefs d’état et leurs systèmes ont été violemment emportés.
Gouverner c’est prévoir. Et la violence est le moyen le plus maladroit qui soit pour prétendre à un avenir en confiance.
Jean-Yves Ntoutoume