J’entends dire, depuis hier soir, de la bouche de tous, que notre équipe a été valeureuse et serait tombée les armes à la main. Je lis, sous la plume de nombre d’entre nous, que cette équipe nous aurait fait honneur et que sa défaite mériterait qu’on lui tresse des lauriers.
Un texte signé JFO
Tout cela est sans doute un peu vrai, eu égard aux circonstances, particulièrement déplorables, dans lesquelles cette équipe a joué.
Mais à y regarder de près, émotion d’après match évacuée, cette élimination est un formidable gâchis, un gâchis constatable à plusieurs niveaux.
Cette élimination est d’abord un gâchis ponctuel et factuel, au regard du match en lui-même et de son scénario. Le gâchis d’un arbitrage honteux, presque conduit essentiellement à charge, qui siffle contre nous un penalty généreux, qui en oublie de sifflet en notre faveur un vrai et qui arrête, de la façon la plus abjecte, une occasion nette de but du fait d’une position de hors-jeu qui n’a pu prendre forme que dans l’imagination malsaine des arbitres malhonnêtes du match.
Une génération dorée
Mais ces faits de jeu, bien que regrettables, sont loin de constituer le vrai gâchis. Celui-ci tient en un seul constat: nous-mêmes Gabonais venons de liquider sans trophée, une génération que les vrais passionnés de football savaient être, une génération dorée, la seule qui, arrivée à maturité à ce jour, de toute l’histoire de notre football, avait le potentiel pour gagner une coupe d’Afrique, pour se qualifier à une coupe du monde.
J’entends dire et je lis, que cette équipe a l’ossature d’un nouveau départ, d’un bon nouveau départ. Hélas, trois fois hélas…car dans notre pays de 2 millions d’habitants, on ne fabrique pas en 1 ans ou 2 un Bruno Ecuele Manga. Dans notre pays de deux millions d’habitants, on ne sort pas du chapeau, un LEMINA, un Didier Ndong ou même un Poko. Dans notre pays de deux millions d’habitants, il faut au minimum une génération, pour produire un joueur de la dimension de Pierre Emerick Aubameyang. Tous ces valeureux compatriotes qui sont aujourd’hui, pour certains, en presque fin de carrière, pour d’autres, exclus de l’équipe nationale.
Comment nous-mêmes, Gabonais, avons-nous réussi à bousiller de l’intérieur cette somme de belles individualités et à fabriquer avec tant de talent et de méthode, une si belle machine à perdre? A mesure que les échéances se rapprochaient, nous avons instrumentalisé certains, développant en eux, une haine des autres partenaires fondée sur la couleur de la peau et les origines sociales.
A mesure que les échéances se rapprochaient, nous avons multiplié les incidents pour troubler la tanière et créer la division parmi les joueurs. A mesure que les échéances se rapprochaient, nous avons remué ciel et terre pour déterrer des scandales jusque-là soigneusement enfouis, de manière à empoisonner l’environnement et l’aura des panthères et salir l’image de l’équipe et du pays.
A mesure que les échéances se rapprochaient, nous avons patiemment déclenché, la plus putride, dégueulasse et malsaine campagne jamais vue contre son équipe nationale, faisant le choix de livrer à la vindicte populaire, les plus emblématiques des représentants de notre drapeau. Dans cet élan macabre, aucune ressource du registre de l’abject n’a été oubliée pour salir les joueurs. Pierre Emerick Aubameyang a réussi à coaliser a lui tout seul, l’ensemble de ses ennemis se recrutant tantôt chez les simples jaloux, les frustrés ou encore les indécrottables tribalistes.
C’est en cela que je parle de gâchis car cette génération finissante, cette génération dorée méritait plus et mieux. Cette génération d’Allevinat et Boupendza mais aussi de Bouanga et Aubameyang. Cette génération de Poko et Kanga mais aussi de Lemina et Didier Ndong. Cette génération d’Ecuele mais aussi d’Appindagoye et de Moussavou King.
Tous responsables
Une dernière chose, j’espère que tous ceux qui ont participé à cette mise à mort programmée auront le courage de se lever pour donner corps au football dont ils veulent dans ce pays. Je pense a quelques présidents de clubs particulièrement attentifs au financement public du championnat national, je pense a des institutionnels de la fédération, je pense à certains anciens joueurs membres d’associations. Je pense à certains hommes de médias en quête de popularité. Je pense à des politiques qui se reconnaitront. Je pense à des citoyens ordinaires, qui ont su insuffler leur venin en masse au » bon » moment.
J’ai une pensée triste pour ceux des vrais supporters et compatriotes qui ont suivi avec amour, cette génération et qui attendaient l’apothéose de Yaoundé qui n’a pas eu lieu.
Quel formidable gâchis.