La cohabitation entre l’homme et la faune sauvage a toujours été conflictuelle pour des raisons d’occupation de l’espace et d’accès aux ressources naturelles Cependant, on observe depuis quelques années une recrudescence des tensions dans le partage de l’espace entre la faune et les êtres humains. C’est aujourd’hui le cas du Gabon où les femmes de Makokou ont tenu à exprimer leur exaspération en organisant une marche dans les artères de cette ville.
Situé dans le bassin du Congo en Afrique Centrale, le Gabon n’échappe pas à cette problématique. Depuis de nombreuses années, le conflit homme-faune prend des proportions inquiétantes. Les plantations des communautés villageoises sont régulièrement ravagées par des éléphants, et certains villages enregistrent des incursions récurrentes des pachydermes Le gouvernement avec la collaboration des organismes internationaux et certaines organisations de la société civile ont entrepris de trouver des solutions pour gérer cette question.
Déjà en 2016, le Gabon avait lancé le Plan National de Gestion du Conflit Homme-Faune, consistant à construire des barrages électriques autour des 11 parcs nationaux dont la présence est souvent mise en avant pour expliquer l’exacerbation du conflit homme-faune. La Banque Mondiale a mis à la disposition du Gabon un budget de 9,5 millions de dollars, afin d’explorer des stratégies et des innovations visant à réduire les conflits humains-espèces sauvages et l’Etat gabonais a lui-même inscrit, pour la première fois, une ligne budgétaire dans la loi des finances 2020 destinée à ce conflit.
Malgré toutes ces précautions et des sommes d’argent débloquées, la situation est en train de prendre des proportions inquiétantes dans diverses localités du Gabon. Après Mekambo, Mouila, Fougamou où l’on n’énumère plus les plantations dévastées par les pachydermes et où les populations ont donné de la voix pour interpeller le gouvernement, Makokou a laissé éclater sa colère le 15 novembre dernier. A la suite des dévastations répétées de leurs cultures, les femmes de cette ville du nord-est du Gabon ont organisé une marche pacifique en direction du gouvernorat pour dénoncer le laxisme du gouvernement sur cette question. Dans l’une de leurs chansons, elles n’ont pas manqué d’ironiser : « ce sont les éléphants qui ont voté pendant les élections ». La suite on la connaîtra en 2023.
Il en est de même à Medouneu où une marche pour marquer le soutien à la famille Nguema Endamane Bernard, endeuillée par la perte de son épouse EkangNguema Fatima tuée par un éléphant, alors qu’elle se rendait à son champ, a été initiée le mercredi 18 novembre dernier. Ces populations appellent désormais au départ du chef de cantonnement des Eaux et Forêts de la localité.
Ndzong, une bourgade située à quelques kilomètres de Libreville a connu un sort identique, le 18 novembre dernier. Un villageois a été tué par un éléphant, alors qu’il se rendait à son champ accompagné de sa femme. Cette dernière a eu la vie sauve à cause de la bravoure du mari qui s’est interposé entre elle et le mastodonte.
Avec autant de deuils, le gouvernement est appelé à mettre en place des solutions promises, pour faire face à une situation qui risque d’être explosive.
Karl D