Pyramid Medias Gabon

Gabon : La presse sinistrée!

On savait la situation difficile depuis un peu plus de 5 ans. Mais avec l’irruption brutale du coronavirus au dernier trimestre 2019, et des mesures drastiques prises pour lutter contre cette pandémie mondiale, les effets néfastes se font durement ressentir dans l’écosystème médiatique.

Du coup, depuis le début de l’année 2021, plusieurs titres de la presse,  régulièrement imprimés, se font rares dans les kiosques de la Sodipresse, la société qui diffuse la presse au Gabon. Qui, elle-même, est née des cendres de la Sogapresse, qui a déposé le bilan, le 31 décembre 2020, après plusieurs décennies d’existence. Signe que le déclin de la presse papier date de plusieurs années.

La crise sanitaire due au Covid-19 est le dernier coup de grâce donné à une presse qui connaissait déjà d’énormes difficultés, aussi bien sur le plan structurel et économique. Mais comme le dit l’adage, « si les éléphants maigrissent, les gazelles meurent ». C’est-à-dire que, si déjà dans les pays développés, émergents et autres, où les entreprises de presse sont développées, mais subissent la crise, que dire du Gabon, un pays où la presse, depuis le retour du pluralisme des médias en 1990, a du mal à se structurer et à être rentable.

Certes, les organes d’information des partis politiques ont cédé progressivement la place aux organes de presse créés pas des individus, puis transformés  en entreprise de presse pour s’arrimer au code de la communication de 2016. Mais, rien n’a véritablement changé en termes de modèle économique.

Avec l’avènement des réseaux sociaux, de la presse en ligne et le piratage des fichiers PDF qui sont publiés gratuitement sur le Net,  la vente au numéro, sur laquelle la presse papier tirait un relatif profit est a elle aussi plombée.

 Face à ce marasme, s’ajoutent l’absence criarde de la publicité; la réduction drastique de la subvention à la presse;  l’absence d’une convention collective dans le secteur et un déficit de formation de plusieurs acteurs des médias.

 Initialement fixée à 500 millions FCFA par an, l’aide publique à la presse, qui constitue l’une des ressources financières des médias (ce qui n’est pas une exception gabonaise), est en mode dégringolade depuis un peu plus de 6 ans, pour se situer à quelques 127 millions à se partager entre une soixantaine de titres (presse écrite et en ligne).

Quid de la publicité ? Son budget annuel demeure un secret d’État au Gabon. Ce, d’autant plus qu’aucune autorité ne la régule et personne ne peut communiquer sur son montant annuel. Conséquence, la publicité se passe entre amis et connaissances et non sur des critères objectifs.

Pourtant, les exigences inhérentes aux entreprises, normalement constituées, notamment en matière d’impôts et de sécurité sociale, n’échappent pas aux entreprises de presse.

Pour s’en sortir, les professionnels du secteur n’ont d’autres choix que de réfléchir sur les stratégies et mécanismes de soutenabilité des entreprises de presse gabonaise. Ces réflexions doivent être basées sur l’exigence d’une augmentation substantielle de l’aide publique à la presse et sur la publicité commerciale et institutionnalisée. Pour un réel modèle économique des entreprises de presse.

Jean-Yves Ntoutoume

 

author

Related Articles

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *