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Editorial : Partis politiques et fonds de commerce !

Trente et un ans après la conférence nationale gabonaise, qui a vu l’avènement du pluralisme politique et le début du processus démocratique dans le pays, force est de constater que les mêmes causes produisent les mêmes effets. Autrement dit, quel bilan élogieux peut-on faire aujourd’hui du processus de démocratisation au Gabon, 31 ans après le retour du pluralisme en 1990?

Une question qui vaut son pesant d’or, au lendemain de la fusion absorption entre le Parti démocratique gabonais et Démocratie nouvelle, pour ne pas dire, l’intégration de Démocratie nouvelle au PDG, parti au pouvoir. Il faut rappeler qu’au début des années 90, d’autres partis ou mouvements politiques, à l’instar du Mouvement commun pour le développement (MCD) de Paul Biyoghe Mba et le Parti de l’unité du peuple (PUP) de Louis-Gaston Mayila, pour ne citer que ces exemples, avaient déjà été absorbés par l’ancien parti unique.

Ici, la véritable question qu’on doit se poser est de savoir, crée-t-on un parti politique au Gabon, pour l’intérêt général ou pour en faire un outil de chantage ou de marchandage politique pour son leader? La foultitude des partis politiques –une soixantaine pour un pays de près de deux millions d’habitants- se justifie-t-elle par le dynamisme de l’expression démocratique ? A cette interrogation, René Ndemezo’o Obiang (RNO), dans sa déclaration du 3 avril dernier, répond: «Lorsqu’on jette un regard critique sur l’évolution de notre démocratie, force est de reconnaître que la prolifération des formations politiques et associations politiques, loin d’être un facteur du dynamisme de l’expression démocratique, semble plutôt être un leurre

On peut donc en déduire, concernant cette prolifération des partis politiques (généralement absents dans les Assemblées locales et nationales), qu’ils sont créés, pour la plupart, pour constituer des fonds de commerce de leurs fondateurs qu’ils peuvent vendre aux plus offrants, à un candidat de la majorité ou de l’opposition. Et on le constate surtout lors des joutes électorales, notamment les élections présidentielles, où ces partis soutiennent des candidats, contre les espèces sonnantes et trébuchantes.

Une autre problématique est le mode de fonctionnement de ces différentes formations politiques. Sans financements, l’Etat ne subventionne que les partis qui ont un certain nombre d’élus. Normalement, c’est aux membres de se cotiser pour  faire vivre l’entité politique. Or, au Gabon, dans la plupart des cas, c’est aux  leaders à qui incombe cette charge. Ce qui n’est pas une sinécure.

Face donc à ce triste constat, qui n’apporte aucune valeur ajoutée au processus de démocratisation gabonais, contrairement à d’autres pays d’Afrique au sud du Sahara (infimes soient-ils), où on compte quelques avancées, en termes d’alternance politique, on peut s’interroger sur l’implication des gouvernants qui semblent s’accommoder, certainement pour les besoins de la cause, àce flou artistique. Et RNO, toujours dans sa récente déclaration, de donner une esquisse de sortie de ce bourbier causé par le foisonnement des formations politiques : «Le regroupement des formations politiques dépend non seulement des pouvoirs publics qui doivent l’inciter par des mesures et des textes pertinents, mais également de la volonté et de la capacité des leaders politiques à renoncer à leurs intérêts domestiques pour intégrer les grands ensembles.»

Mais tant que ce jeu profite à un camp politique qui est aux commandes de l’Etat et qui ne compte pas renoncer au pouvoir, cette proposition peut-elle se concrétiser? Là gît le lièvre.

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