Sans pour autant se dessiner ainsi, de manière aussi précise, le diagnostic vital de Jean Ping, politiquement parlant s’entend, semble, en tous cas pour certains, engagé. Les médias gabonais sont assez largement revenus sur les récentes « sorties sur le terrain » d’Alexandre Barro Chambrier dans son arrondissement.
Et la « Tribune des partis politiques » d’ONDOUBA’NTSIBAH du quotidien l’Union n’a pas manqué de relever que « les mesures gouvernementales à la lutte contre la propagation du coronavirus…avaient contraint les partis politique….à annuler leurs sorties sur le terrain » et que « pendant plus de sept mois, les uns et les autres ont limité leurs activités dans des salles restreintes ou dans des bureaux ». Mais, note le chroniqueur politique de « l’Union », « depuis quelques semaines, on constate un petit frémissement sur le terrain, plusieurs formations se signalent ici et là… »,notamment le Rassemblement pour la Patrie et la Modernité dont les « sorties sur le terrain » interviennent après la visite de l’Ambassadeur de France d’un certain nombre de leaders estampillés opposition. Dans le quotidien « l’Union », Ondouba’Ntsiba n’en doute pas : « Barro Chambrier…ne cache pas du tout ses ambitions…présidentielles ».
De notoriété publique, ABC est reconnu comme le fervent défenseur d’une transition conduisant à « l’alternance » et qui n’aura pas pour objectif de « mettre à l’écart un tel ou un tel » Une sortie qui, selon le chroniqueur, ne manquera pas d’être « scrutée et maintes fois analysée du côté du directoire de cette plateforme politique présidée par Jean Ping », d’autant qu’ABC parle déjà en leader : «je suis venu vous dire que nous pouvons être parmi ces instruments que Dieu a envoyés pour que nous soyons en première ligne pour ce changement qui va soulager tout le monde». «Ce ne sont pas des paroles, ce sont autant des convictions que vous devez avoir».
ABC fait partie des nombreux cadres qui se sont disputés l’héritage d’Omar Bongo Ondimba. Nombreux, dès 2009, ont déserté les rangs du Parti Démocratique Gabonais. D’autres, progressivement, de 2009 à 2016, n’ont pas rejoint une opposition qui n’existait plus mais, plutôt, reconstitué une opposition au pouvoir. Figures de proue : André Mba Obame qui s’est nourri des cendres politiques de Mba Abessole, et Jean Ping qui n’a pas hésité à afficher son soutien inconditionnel à AMO tout en précisant que si l’homme, malade, ne se représentait pas en 2016, il lui demanderait de le soutenir.
Alexandre Barro Chambrier est parfaitement conscient que l’homme de 2016 est bien Jean Ping qu’il n’a d’ailleurs rejoint que sur le tard. Lors de sa récente tournée dans le 4ème arrondissement, l’un des cadres de son parti lui a recommandé de « ne pas lâcher prise car la victoire est inéluctable pour que la réalité des urnes qui donne Jean Ping vainqueur soit reconnue. » Accueilli par Adrien AdiahenotIvanga à Toulon, ce dernier a tenu à lui remettre en mémoire le fait que les populations du 4ème ont « voté massivement pour le candidat du changement, Jean Ping ». ABC n’a pu donc échapper à la nécessité de confirmer ceci : « qu’on le veuille ou non, Jean Ping a la légitimité populaire ». Le patron du RPM a, toutefois, signalé aux populations qu’il reste une bataille, celle de « faire correspondre cette légitimité avec la légalité ». Mais que « si dialogue il y a, cela se fera autour du président élu Jean Ping ».
Mais Jean Ping s’est-il fait tout seul ? Il a fallu à ce dernier de résoudre au préalable la question du vivier où il allait gagner ses troupes. Longtemps, l’Union nationale de Myboto, principalement implantée dans le Woleu-Ntem, fut un frein pour Jean Ping, jusqu’au 16 août 2016. Gros écueil que Ping devra contourner. Pour y parvenir, il s’appuiera sur les Ndemezo’Obiang René, Pierre AmougheMba, Vincent Essono Mengue, et Jean Eyeghe Ndong. Aujourd’hui, quatre ans après la présidentielle de 2016, il faudra également expliquer et s’expliquer sur ce qui a changé. Ceux qui ont les mains tachées du « sang des martyrs du QG de Jean Ping » sont ceux aujourd’hui avec qui il est désormais possible de parler transition ou de dialogue « sans mettre à l’écart un tel ou un tel » (dixit Chambrier). Qu’est-ce qui a changé ? Qui a changé ?
Stéphane MWAMEKA
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