Le lundi 5 octobre 2020 dernier s’est tenue la rentrée judiciaire annuelle. A cet effet, il n’est pas inopportun de faire un tour d’horizon de l’état dans lequel se trouve le système judiciaire gabonais.
Le président Ali Bongo Ondimba,il y a un an, disait: « Il faut une offre de justice adaptée, crédible, transparente et accessible à tous les citoyens ». Cette ambition,somme toute légitime, n’est pas sans susciter plusieurs doutes dans l’esprit du citoyen lambda. Les dérives auxquelles on assiste quotidiennement dans le fonctionnement de notre système judiciaire démontrent qu’on n’est pas encore sorti de l’auberge. Malgré les sessions criminelles tenues en bonne et due forme l’année dernière, il demeure encore des goulots d’étranglement qui bloquent une normalité fonctionnelle de ce système judiciaire. C’est vrai, il y a eu le traitement de 152 affaires avec 142 décisions rendues, mais des obstacles demeurent.
L’espace judiciaire gabonais est gangrené par des maux qui, parfois, portent atteinte à la dignité humaine. La garde à vue n’est souvent pas respectée dans sa durée. La détention préventive s’est transformée en détention autoritaire, punitive. La présomption d’innocence, dans le système judiciaire gabonais, devient la présomption de culpabilité. Les droits du prétendu coupable sont souvent « enterrés », voire ignorés.
Pire, la justice est, selon certains, aux ordres du pouvoir politique dans nombre d’affaires. La première condition d’une véritable modernisation du système judiciaire gabonais passe au préalable par une séparation nette du politique et du judiciaire. Comme dans d’autres pays, on pourrait dans l’avenir enlever au Président de la République le rôle de président du Conseil supérieur de la Magistrature.C’est la trop grande immixtion du politique dans le judiciaire qui semble poser problème. Héritier du modèle jacobin français, où tout est centralisé, le système judiciaire Gabonais pâtit de cela.
En ce qui concerne les droits de l’Homme, la situation n’est guère reluisante. Malgré la rédaction des rapports nationaux y relatifs, en conformité avec les engagements internationaux pris par le Gabon, il y a des problèmes. Ainsi le Gabon a des prisonniers politiques. Les cas de Bertrand Zibi, Pascal Ouyougou, d’Obama et d’autres détenus sont clairs. Ces compatriotes sont incarcérés pour opinion contraire au régime actuel. Une justice crédible devrait résoudre ce problème,
Or, il n’en est rien. Les textes d’application des nouveaux code pénal et code de procédure pénale ont certaines réformes, notamment le travail d’intérêt général au lieu de l’emprisonnement, mais beaucoup reste à faire.
Serge Bibang