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Léandre Nzué lâché par ses soutiens

Ali Bongo Ondimba n’a pas soutenu Léandre Nzue. On s’y serait pourtant attendu après cette déclaration, tout feu tout flamme, en juin 2020 : « C’est grâce à Ali Bongo que je suis ici. Je prépare déjà 2023. Je dois sécuriser les votes d’Ali Bongo à Libreville. Pendant que je suis là, 2023, Ali Bongo ne perdra pas ici à Libreville. Il va gagner, car je suis à la mairie ».

Une déclaration publique d’une telle loyauté et d’un tel engagement est incontestablement, écrivions-nous « un témoignage de fidélité sans faille qui devrait faire office de cuirasse politique pare-balle à l’épreuve de tout « sniper ». Une sorte d’assurance-survie. Manifestement, l’édile de Libreville réclamait protection.  Notamment face à la bourrasque anti-BLA dont lui, un proche de l’ancien directeur de cabinet d’Ali Bongo, redoutait très certainement l’impact.

Le 9 septembre dernier, nous nous posions la question du sort qui lui serait réservé et de l’identité du ou de la « sniper » qui pourrait bien en vouloir à ce point au Maire de Libreville qui venait, quelques temps avant, d’apporter ce fougueux, bruyant et inconditionnel soutien à Ali Bongo Ondimba, trois ans avant la prochaine présidentielle de 2023: « Moi Léandre Nzue, maire de Libreville. En 2009 Ali Bongo Ondimba n’a pas gagné à Libreville. En 2016 nous n’avons pas gagné, mais moi, maire de Libreville, le président gagnera en 2023 cette fois. » Qui dit mieux ? C’est bien Ossouka qui était principalement visée. Mais, depuis cette déclaration, on peut désormais conclure que l’homme n’a pas été entendu. ABO a fait son choix et, depuis les tracasseries du B2 jusqu’au mandat de dépôt, observe un silence qui ne peut qu’en dire long. L’adage n’enseigne-t-il pas « qui ne dit mot consent ».

Que reproche-t-on à Léandre Nzue ?

Son avocat, Me Moubembe, auprès de notre confrère Gabon Media Time, explique : « « Contre mon client, le parquet a retenu le détournement de fonds publics plus d’un milliard de francs CFA extorsion de fonds, concussion, association de malfaiteurs, chantage, détournement de biens ». Léandre Nzue devrait répondre de 8 chefs d’accusation. L’homme, selon certains confrères, menait grand train. On parle de « dépenses vestimentaires et automobiles » ostentatoires, d’un parc automobile de près de 10 voitures, de bateaux de plaisance etc…

Mais est-ce là un « crime » au Gabon de Bongo ? Qui n’a pas volé un œuf pour, plus tard, voler un bœuf ? Ils sont là et connus. Et, chose désormais normale, alors que certains sont en prison, d’autres roulent carrosse en toute liberté. Autrement dit, on peut en déduire que ceux qui se retrouvent derrière les barreaux y sont pour des raisons plus politiques que de droit commun.

Qui ignore que les fortunes colossales du Gabon se sont constituées sur la base d’une assimilation-confusion entre les deniers et biens publics du Gabon et les propriétés personnelles d’un tout petit nombre ? Qui ignore que les dettes pharaoniques dont est redevable notre pays ne sont pas dues à la construction des infrastructures du pays ? Qui ignore que l’argent du Gabon « appartient » à qui on sait et que se l’approprier n’est pas donné à tout le monde.

Un grand clerc d’Etat, ancien ministre du Pétrole, interpelé pour un détournement de 20 milliards de FCFA, a pu faire dire par son cabinet que ce n’était pas du vol. Et, de fait, il n’a pas été inquiété jusqu’aujourd’hui. Plus d’une dizaine de visas sont en effet obligatoires, du Ministère des Finances à la Trésorerie Générale de l’Etat, pour sortir une somme quelconque des caisses de l’Etat. Contrairement à ce que l’on peut s’imaginer, l’argent public n’est pas facilement accessible à tout mortel au Gabon En un mot, « détourner » l’argent public du Gabon, notamment de grosses sommes supérieures à 10 millions de FCFA, ne peut se faire qu’en plein jour. Au vu et au su de ceux qui autorise le détournement. C’est pourquoi il est difficile de traduire les détourneurs de deniers publics devant les Tribunaux ; et les crimes économiques, comme les crimes rituels, sont aussi vite enterrés que dénoncés. Par exemple, quid de l’argent des Fêtes Tournantes ? Chacun a pris sa part. La corruption des élites dirigeantes est ainsi une arme importante. Elle explique, en grande partie, le silence des uns et la connivence des autres.

Faut-il alors penser que Léandre Nzue vient de faire les frais d’une rupture de cette connivence et de ce silence ?

En tous cas, sa charge verbale, bien que masquée, qui ciblait l’ancienne mairesse de Libreville ne lui a certainement pas été favorable. Bien au contraire. Nommée, en février 2019,  Ministre d’Etat, ministre de la Défense Nationale et de la Sécurité du Territoire, Ossouka Raponda venait de gagner officiellement la confiance de la Présidence de la République. Ce que Léandre Nzue n’avait peut-être pas bien mesuré. Il avait encore moins prévu qu’elle se muerait, le 16 juillet 2020, en Premier Ministre, 17 mois après son retour au Gouvernement mais, surtout, quelques jours seulement après les tonitruantes déclarations proférées par L. Nzue contre elle. Ce que dernier doit amèrement regretter du fond de sa cellule à Gros-Bouquet.

De là à penser que Léandre Nzue paie le prix sa connivence politique avec la galaxie Ajev-BLA, d’aucuns franchissent aisément le pas et rappellent que le samedi 5 octobre au stade de Nzeng-Ayong dans le 6ème arrondissement de la commune de Libreville, le discours du maire de la commune de Libreville fut le temps fort de ce que certains ont qualifié de « La terminada avec faste de la tournée républicaine et politique de Brice LaccrucheAlihanga. » Au cours de cette « apothéose », le maire de la commune de Libreville Léandre Nzué s’était plié en quatre pour accueillir le « messager du président de la République » et lui remettre la clé de la ville de Libreville.

Au fait, le grand clerc d’Etat dont nous parlions plus haut est toujours en liberté…mais jusqu’à quand ? Le nettoyage anti-BLA ne semble pas terminé.

 Stéphane MWAMEKA

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